Des avancées mais aussi des manquements … La lettre ouverte au Colonel Mamadi DOUMBOUYA

Point de vue

Par Alpha Boubacar Baldé

Monsieur le Président,

Dans la matinée du Dimanche 5 septembre 2021, le peuple martyr de Guinée s’est réveillé aux sons de coup de feu dans la commune de Kaloum aux alentours du palais présidentiel. A mon réveil ce jour, en regardant le fil d’actualité Facebook sur mon téléphone, j’ai vu des informations au sujet de ces coups de feu à Kaloum sans vraiment oser y croire. Il faut dire que, j’avais perdu espoir qu’un jour notre armée serait capable d’un sursaut patriotique pour sauver ce qui restait de notre « Nation ».

Il m’a fallu voir Alpha CONDE débrayé, déboutonné et le regard hagard au milieu des membres de votre unité pour me rendre à l’évidence. Mon Colonel, à cet instant précis, je ne peux vous décrire le sentiment qui m’a traversé. Une chose est sûre, j’ai été envahi par différents sentiments :

  • La joie d’être enfin libéré du joug d’un Président qui s’est dévoyé,
  • L’espoir que notre pays venait d’avoir une ultime chance de réécrire son avenir,
  • L’inquiétude de l’échec dans la conduite d’une transition apaisée, inclusive et transparente.

Tout comme une large majorité de la population Guinéenne, j’adhère et approuve ce coup d’état qui est en fait un coup salvateur. Le véritable coup d’état, c’était le changement de constitution et le fait d’imposer un troisième mandat au peuple martyr de Guinée. L’intervention de votre unité était donc salvatrice à plus d’un titre. Dans vos allocutions diffusées d’abord sur les réseaux sociaux et ensuite sur les antennes de la RTG, vous avez motivé votre intervention par la situation socio-politique et économique du pays, le dysfonctionnement des institutions républicaines, l’instrumentalisation de la justice, l’irrespect des principes démocratiques, la politisation à outrance de l’administration publique, la gabegie financière, la pauvreté et la corruption endémique. Ces maux que vous avez listés lors de votre intervention, sont chacun, individuellement pris, des motifs qui justifient votre intervention. Ces maux gangrénaient notre pays tel un cancer qui métastase.

Monsieur le Président,

Le 5 septembre 2021, vous preniez avec les membres de votre unité, la décision courageuse de libérer le peuple martyr de Guinée. Je suis conscient des défis auxquels vous faites face. J’imagine combien, la tâche est complexe et ardue. J’ai l’habitude de dire, que le jour où la Guinée aura un Président désireux de servir le peuple, face à l’immensité de la tâche, il sera tenté de quitter la Présidence. Seul un patriote qui fait don de soi est capable de remettre notre pays sur les rails.

Dans votre interview sur RFI du 15/11/2021 vous disiez alors à Alain FOKA je cite : « Ma vie entière je la donnerai à ce peuple-là, qui mérite ça. Et si on a décidé le 5 septembre d’aller à la mort, c’est parce qu’on avait vu l’état de notre pays ».

Plus loin, à la question de savoir si vous serez candidat aux prochaines échéances électorales, vous disiez, « Je pense que j’ai été clair, et je vais l’être aujourd’hui encore avec vous : ni moi ni aucun membre de cette transition ne sera candidat à quoi que ce soit. Nous allons mener la transition à bon port avec tous les Guinéens ». Ces déclarations vous honorent Monsieur le Président. En tant que Guinéen, épris de notre pays et conscient de son potentiel, vos déclarations me rassurent et me donne espoir en des lendemains meilleurs pour notre peuple martyrisé.

Monsieur le Président,

Aujourd’hui, nous sommes le 5 décembre 2021. Bientôt, les 100 jours depuis que vous avez pris la lourde charge de diriger notre pays. Nous arrivons au terme de « l’état de grâce », cette expression religieuse utilisée sur le plan journalistique pour désigner, le moment de la vie politique pendant lequel l’opinion publique d’un pays est majoritairement favorable aux nouveaux dirigeants qui viennent d’accéder au pouvoir. Après 3 mois de gestion et bientôt 100 jours aux affaires, il est temps faire un bilan de vos actions et d’entrevoir les perspectives pour notre pays durant cette période de transition.

Parmi les bonnes réalisations à votre actif, celles qui retiennent le plus mon attention sont les suivantes :

  • Les actes de réconciliation que vous avez posés  
  • La nomination d’un gouvernement de technocrates composé uniquement de civils
  • L’adoption d’une charte de transition à laquelle le peuple adhère
  • La consultation des différentes composantes de la société Guinéenne sur l’orientation à donner à cette transition
  • L’interdiction de voyage et le gel des avoirs des anciens gouvernants le temps des audits
  • L’interdiction de sortie du territoire pour les membres de l’ancien gouvernement
  • L’audit du fichier de la fonction publique et la mise à la retraite des ayants droit
  • La mise à la retraites dans les rangs des Forces de Défense et de Sécurité pour les ayants droit
  • Votre engagement personnel et celui que vous avez pris sur la non-participation des membres de l’administration de la transition aux futures échéances électorales
  • Le gel des décaissements et la mise en place d’un processus de justification et de validation des dépenses publiques
  • La décision de faire de la Justice la boussole qui orientera le peuple de Guinée
  • Votre volonté de rompre de manière définitive avec les pratiques nocives des anciennes administrations
  • L’adoption des 5 valeurs du CNRD (Les 5 R) :
    • La Rectification institutionnelle : Bâtir des institutions fortes et légitimes
    • La Refondation de l’Etat : Moraliser la vie publique, restaurer l’autorité
    • Le Rassemblement : Conduire les affaires publiques de manière inclusive
    • Le Redressement : Rompre avec les anciennes pratiques et favoriser la transparence
    • Le Repositionnement : Respecter les engagements internationaux et repositionner le pays à l’international   
  • La création du CRIEF (Cours de Répression des Infractions Economiques et Financières) pour instruire les dossiers de détournement de deniers publics.

Parmi les manquements que j’identifie et qu’il me semble important de traiter pour une exemplarité de cette nouvelle administration, il y a :

  • La non-divulgation de la liste des membres du CNRD, qui est pourtant un organe de la transition figurant dans la charte de transition. Cela, entretient le flou sur la composition de cet organe. Dire qu’il est composé de l’ensemble des forces armées est une boutade. Même si c’était le cas, il est évident qu’un collège de responsables militaires siège au sein du CNRD. Cette liste doit être rendue publique par souci de redevabilité vis-à-vis du peuple de Guinée.
  • La non-déclaration du patrimoine par l’ensemble des membres de votre gouvernement n’est pas de nature à favoriser la transparence dans la gestion de la chose publique.
  • L’absence de définition de la durée de la transition dans la charte. Evacuer cette question au sein du CNT, n’est à mon avis pas opportun. Comment voulez-vous, demander à des conseillers nationaux qui vont bénéficier d’avantages et émoluments de décider de la durée pendant laquelle ils vont bénéficier de ces avantages en toute objectivité ?
  • La non-présentation par le CNRD et le gouvernement 3 mois après la prise du pouvoir, des actions à mener durant la transition et qui pourraient servir de base à la définition d’un chronogramme et donc d’une durée de la transition sur des bases objectives.
  • La non-clarification du statut de l’ancien président qui à mon avis doit être inculpé ou libéré. Trois mois après le coup d’état, il est plus que temps que les restrictions à sa liberté soient encadrées juridiquement à travers une inculpation pour sa responsabilité sur les crimes commis durant ses mandats.
  • L’instruction des dossiers d’audit sur la gestion de l’ancienne administration (Ministère, Régies financière, JAC 518, Organismes publics et parapublics…) et l’inculpation des gestionnaires indélicats.
  • L’absence de définition claire des critères concernant la désignation par les différents organismes des membres du CNT. Ce qui retarde la mise en place de cet organe législatif de la transition.  
  • Le retard dans le nettoyage de certaines directions notamment la CNSS, la DNI, l’ARPT, le PAC, la SOGEAC, l’ANAIM, le Fonds d’Entretien Routier (FER), l’Autorité de Régulation des Marchés Publics…
  • L’absence d’installation au moins sur chaque contient, d’un bureau permanent pour la mise à disposition de passeport. Il est inconcevable qu’après 63 ans d’indépendance, que nos ambassades ne soient pas en mesure d’établir ces documents à la diaspora Guinéenne à l’étranger.
  • L’absence de mise en place d’un cadre de concertation sur la conduite de cette transition avec l’ensemble des forces politiques qui ont participé à des élections en Guinée. La précision est importante. Il ne sert à rien de convier à des discussions des partis politiques fonds de commerce qui n’ont d’existence que l’agrément, de militants que la famille du leader et pour siège le porte document du Président ou son domicile.  

Monsieur le Président,


Ne craignez pas la contradiction, c’est par la confrontation de points de vue divergents que les meilleures idées émergent


Je suis exigeant avec vous. Je le sais, mais pour changer positivement notre société, le peuple de Guinée doit être exigeant vis-à-vis de ces gouvernants. Vous (les gouvernants) êtes au service du peuple. Vous êtes là pour servir le peuple et non vous servir de lui. Si le peuple de Guinée avait été exigeant avec vos prédécesseurs, nous n’en serions pas là aujourd’hui. Les manquements listés précédemment sont des actions à mettre en place pour continuer sur votre lancée. Elles complètent celles que vous avez déjà initiées. Ensemble, elles permettront la naissance d’une Guinée Nouvelle que nous appelons tous de nos vœux.

Ne vous méprenez pas sur les objectifs de votre mission. Une transition n’a pas vocation à développer un pays. Le CNRD doit mettre en place des institutions inébranlables et réunir les conditions pour la tenue d’une élection libre, transparente et inclusive tout en laissant la liberté au peuple de librement choisir son dirigeant.

Ne vous méprenez pas sur la durée de la transition. Si vous l’allongez plus qu’il ne le faut, la lune de miel avec le peuple de Guinée va virer au cauchemar. Le peuple a soif de liberté, de justice, de démocratie et de développement.

Ne vous méprenez pas sur votre toute puissance. Aujourd’hui, vous êtes à la tête du pays, la situation d’Alpha Condé qui se croyait tout puissant et courtisé hier et qui se retrouve seul et abandonné aujourd’hui doit vous rappeler à l’humilité.

Ne vous méprenez pas sur vos collaborateurs. Privilégiez la compétence, le patriotisme, l’engagement, le sens républicain, la droiture et l’éthique dans le choix de vos collaborateurs. Dans notre pays, les anciens gouvernants avaient perverti la pyramide des valeurs (humaines, éthiques et morales). Il est de votre responsabilité par l’exemplarité de restaurer ces valeurs dans la gestion de la chose publique. La nouvelle génération ne doit pas avoir comme modèle les Kleptocrates de l’ancienne administration.

Ne vous méprenez pas concernant vos amis. Ceux-là qui acquiescent à tout ce que vous dites, ne sont pas vos amis. Ne craignez pas la contradiction, c’est par la confrontation de points de vue divergents que les meilleures idées émergent.

Cette lettre est le cri de cœur d’un Guinéen fou de la Guinée. Un Guinéen qui espère, que notre peuple martyr va enfin avoir des dirigeants soucieux de son bien-être. Un Guinéen qui espère que cette fois la Guinée va emprunter le bon chemin.

Puissions-nous être à la hauteur du moment que nous vivons actuellement.

Puissions-nous au terme de cette transition faire un PEUPLE, une NATION JUSTE, UNIE, INDIVISIBLE et PROSPERE.

Puissions-nous mettre en valeur notre patrimoine commun LA GUINEE en dehors de toute considération tribale.

Puissions-nous avoir une administration au service du PEUPLE.

Puisse l’abondance, dont la providence a doté notre être mise au service du peuple.

Puisse l’impunité et la corruption érigées en système de gouvernance être éradiquées.

Puisse le MERITE être le seul critère de promotion aux emplois publics pour une administration efficace au service du peuple.

Puisse nos Hommes politiques être conscients du fait que prétendre à diriger aux destinées d’une NATION consiste à « SERVIR » et non « SE SERVIR ».

Puissions-nous être fiers d’être des Guinéens tout simplement.

Monsieur le Président,

J’espère de tout cœur, que vous prendrez connaissance de cette lettre écrite par un citoyen concerné par le devenir de son pays et de ses concitoyens. Un citoyen qui vous interpelle avec les tripes. Un citoyen qui encore aujourd’hui craint de se réveiller et de réaliser que tout ce changement que vous avez amorcé dans notre pays était un rêve.  

Pour finir mon Colonel, je partage avec vous ces quelques mots d’un ami à propos de notre mère patrie la Guinée. Je ne doute point de l’écho qu’ils auront dans votre cœur de patriote comme ce fut le cas pour moi :

« Avant moi, tu existais déjà

Après moi, tu existeras encore

Terre mère, patrie de cœur, tu n’appartiens à nul Guinéen

Les Guinéens t’appartiennent, tu es l’origine

Te servir nous unira

C’est bien de t’aimer individuellement

C’est mieux de t’aimer tous ensemble. »

Patriotiquement votre,

Un citoyen concerné

Alpha Boubacar Baldé




L’intégralité de l’interview télévisée du président de la transition


Première grande interview télévisée du président de la transition en Guinée, Colonel Mamadi Doumbouya.

« La division n’arrange que celui qui divise et pas ceux qui sont divisés »

Première partie

Deuxième partie





La CEDEAO et son envoyé spécial Ibn Chambas, Conakry décline l’offre

Désigné Envoyé spécial de la CEDEAO en Guinée, dans le but de « renforcer le dialogue avec les autorités de la Transition », Ibn Chambas ne sera peut-être pas à Conakry pour cette énième mission en Guinée. Pour cause, le président de la transition guinéenne, Colonel Mamadi Doumbouya, vient, dans une lettre adressée au président ghanéen, président en exercice de la CEDEAO, exprimer sa position en ces termes :

« [ ] la nomination d’un envoyé spécial ne nous parait ni opportun, ni urgent dans la mesure où aucune crise interne, de nature à compromettre le cours normal de la transition, n’est observée. La mise en place des organes de la transition se déroule comme prévu, dans un climat apaisé et en parfaite symbiose avec les forces vives du pays ».

Lisez le courrier adressé au chef de l’Etat ghanéen, Nana Akufo-Addo





La CEDEAO « encourage les autorités de la Transition à soumettre rapidement un chronogramme »


3eme SOMMET EXTRAORDINAIRE DE LA CONFERENCE DES CHEFS D’ETAT ET DE GOUVERNEMENT DE LA CEDEAO SUR LA SITUATION AU MALI ET EN GUINEE

La Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) s’est réunie en session extraordinaire, le 7 novembre 2021 à Accra, République du Ghana, sous la présidence de S.E.M. Nana Addo Dankwa AKUFO-ADDO, Président de la République du Ghana, et Président en exercice de la Conférence. Ladite session avait pour objet d’évaluer l’évolution de la situation politique en République de Guinée et en République du Mali.

Étaient présents à cette Session, plusieurs Chefs d’État et de Gouvernement.

A l’issue des délibérations, la Conférence a entériné les principales conclusions contenues dans les memoranda sur la situation politique en République de Guinée et en République du Mali. Lire et télécharger le communiqué final ICI.

Extraits de quelques conclusions

Transition guinéenne

Elle prend note des derniers développements intervenus en Guinée, notamment l’adoption de la Charte de la Transition, la nomination d’un Premier Ministre civil et la formation du Gouvernement de Transition. Elle encourage les Autorités de la Transition à soumettre rapidement un chronogramme détaillé d’activités à entreprendre dans le cadre de la transition, en vue d’assurer la tenue d’élections, conformément aux décisions issues du Sommet extraordinaire des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO, tenu le 16 septembre 2021.

La Conférence décide de nommer S.E. le Dr Mohamed Ibn Chambas Envoyé spécial en Guinée, dans le but de renforcer le dialogue avec les Autorités de la Transition et de favoriser la réussite d’un processus de transition dans les plus brefs délais.


Transition malienne

” Sur le plan politique, le Président de la CEDEAO a informé la Conférence de la notification officielle par les Autorités de Transition de leur incapacité à respecter la date limite de transition de février 2022. La Conférence déplore vivement l’absence de progrès dans la préparation des élections, notamment l’absence d’un calendrier détaillé des activités pour la tenue des élections aux dates convenues.”

” La Conférence rappelle la nécessité du respect du calendrier de la transition pour les élections prévues le 27 février 2022, et demande aux Autorités de la Transition d’œuvrer dans ce sens afin d’assurer le retour rapide à l’ordre constitutionnel. Par conséquent, la Conférence appelle la communauté internationale à prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce que les autorités de transition respectent leur engagement en faveur d’un retour rapide à l’ordre constitutionnel.





Gouvernement Mohamed Béavogui


Le 5 septembre 2021, Colonel Mamadi Doumbouya prenait le pouvoir. Depuis cette date, la Guinée vit aux couleurs du CNRD. Un mois après être arrivé au pouvoir à la suite d’un putsch, le nouveau président de transition, le colonel Mamady Doumbouya, a nommé, mercredi 6 octobre, Mohamed Béavogui, au poste de premier ministre. Le 5 novembre, deux mois après, la liste complète du gouvernement de transition est dévoilée.

  1. Fatoumata Yarie Yansané Gardes des sceaux, ministre de la Justice et des Droits de l’Homme ;
  2. Aboubacar Sidiki Camara Ministre délégué à la Présidence chargé de la Défense nationale ;
  3. Mory Condé Ministre de l’Administration du territoire et de la Décentralisation ;
  4. Bachir Diallo Ministre de la Sécurité et de la Protection civile ;
  5. Morrisanda Kouyaté Ministre des Affaires étrangères, de la Coopération internationale, de l’Intégration africaine et des Guinéens de l’étranger ;
  6. Lancine Condé Ministre de l’Economie, des Finances et du Plan ;
  7. Moussa Cissé Ministre du Budget ;
  8. Julien Yombouno Ministre du Travail et de la Fonction publique ;
  9. Louopou Lamah  Ministre de l’Environnement et du Développement durable ;
  10. Mamoudou Nagnalen Barry Ministre de l’Agriculture et de l’Élevage ;
  11. Ibrahima Abé Sylla Ministre de l’Energie de l’Hydraulique et des Hydrocarbures ;
  12. Moussa Magassouba Ministre des Mines et de la Géologie ;
  13. Yaya Sow Ministre des Infrastructures et des Transports ;
  14. Aminata Kaba  Ministre des Postes, des Télécommunications et de l’Economie numérique ;
  15. Ousmane Gaoual Diallo Ministre de l’Urbanisme, de l’Habitat et de l’Aménagement du territoire ;
  16. Charlote Daffé  Ministre de la Pêche et de l’Economie maritime ;
  17. Bernard Gomou Ministre du Commerce, de l’Industrie et des Petites et Moyennes entreprises ;
  18. Diaka Sidibé Ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de l’Innovation ;
  19. Guillaume Hawing Ministre de l’Enseignement pré-universitaire et de l’Alphabétisation ;
  20. Alpha Bacar Barry Ministre de l’Enseignement technique et de la Formation professionnelle ;
  21. Mamadou Péthé Diallo Ministre de la Santé et de l’Hygiène publique ;
  22. Rose Pola Pricemou Ministre de la Communication et de l’Information ;
  23. Lansana Béa Diallo Ministre de la Jeunesse et des Sports ;
  24. Aicha Nanette Conté Ministre de la Promotion féminine, de l’Enfance et des Personnes vulnérables ;
  25. Alpha Soumah Ministre de la Culture, du Tourisme et de l’Artisanat ;
  26. Abdourahmane Sikhé Camara Secrétaire général du gouvernement ;
  27. Elhadj Karamo Diawara Secrétaire général aux Affaires religieuses.
Réseaux sociaux




La CEDEAO se félicite «des importantes décisions qui ont été prises par les autorités de la transition»

Politique

En séjour à Conakry, une délégation de la CEDEAO a rencontré les autorités de la transition pour « faire un peu le point et voir surtout dans quelle mesure la Cédéao peut accompagner de manière pratique, de manière concrète, le processus en cours » selon Jean-Claude Kassi Brou, le président la Commission de la Cédéao

Voici l’intégralité du Communiqué de la mission de la Commission de la CEDEAO en République de Guinée





25 ministères et 2 secrétariats généraux, la structure du gouvernement de transition dévoilée

Politique

Dans un décret lu sur les ondes à la télévision nationale ce vendredi 08 octobre 2021, le gouvernement de transition est structuré comme suit :

25 ministères et 2 secrétariats généraux

  1. Gardes des sceaux, ministère de la Justice et des Droits de l’Homme ;
  2. Ministère délégué à la Présidence chargé de la Défense nationale ;
  3. Ministère de l’Administration du territoire et de la Décentralisation ;
  4. Ministère de la Sécurité et de la Protection civile ;
  5. Ministère des Affaires étrangères, de la Coopération internationale, de l’Intégration africaine et des Guinéens de l’étranger ;
  6. Ministère de l’Economie, des Finances et du Plan ;
  7. Ministère du Budget ;
  8. Ministère du Travail et de la Fonction publique ;
  9. Ministère de l’Environnement et du Développement durable ;
  10. Ministère de l’Agriculture et de l’Élevage ;
  11. Ministère de l’Energie de l’Hydraulique et des Hydrocarbures ;
  12. Ministère des Mines et de la Géologie ;
  13. Ministère des Infrastructures et des Transports ;
  14. Ministère des Postes, des Télécommunications et de l’Economie numérique ;
  15. Ministère de l’Urbanisme, de l’Habitat et de l’Aménagement du territoire ;
  16. Ministère de la Pêche et de l’Economie maritime ;
  17. Ministère du Commerce, de l’Industrie et des Petites et Moyennes entreprises ;
  18. Ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de l’Innovation ;
  19. Ministère de l’Enseignement pré-universitaire et de l’Alphabétisation ;
  20. Ministère de l’Enseignement technique et de la Formation professionnelle ;
  21. Ministère de la Santé et de l’Hygiène publique ;
  22. Ministère de la Communication et de l’Information ;
  23. Ministère de la Jeunesse et des Sports ;
  24. Ministère de la Promotion féminine, de l’Enfance et des Personnes vulnérables ;
  25. Ministère de la Culture, du Tourisme et de l’Artisanat ;
  26. Secrétariat général du gouvernement ;
  27. Secrétariat général aux Affaires religieuses.




«Une Guinée où tous les Guinéens se retrouvent» Mohamed Béavogui

Politique

Brève allocution du nouveau premier de transition en Guinée, Mohamed Béavogui ”Une Guinée où tous les Guinéens se retrouvent ”

Vidéo CNRD Facebook





Mohamed Béavogui nommé premier ministre de transition

Politique


Le colonel Mamady Doumbouya a nommé un vétéran du développement pour former un gouvernement de transition, un mois après le putsch contre le président Alpha Condé.

Un mois après être arrivé au pouvoir à la suite d’un putsch, le nouveau président de transition en République de Guinée, le colonel Mamady Doumbouya, a nommé, mercredi 6 octobre, Mohamed Béavogui, un vétéran du développement sans expérience gouvernementale, au poste de premier ministre. Le colonel Doumbouya, commandant des forces spéciales qui ont renversé Alpha Condé le 5 septembre, tient ainsi sa promesse de nommer un premier ministre civil, une personnalité éloignée de la politique intérieure et peu suspecte de participation aux querelles intestines des dernières années.

Mohamed Béavogui, âgé de 68 ans, qui a été « ancien sous-secrétaire général des Nations unies, est nommé premier ministre de la transition, chef du gouvernement », selon le décret lu mercredi soir à la télévision publique. Depuis le putsch, celui qui a prêté serment comme président de transition vendredi a promis de rassembler les Guinéens, au-delà des appartenances politiques ou ethniques.

M. Béavogui est le fils d’un diplomate originaire de Macenta, en Guinée forestière (région du sud du pays) et le neveu par sa mère de Diallo Telli, premier secrétaire général de l’Organisation de l’Unité africaine (OUA), mort en 1977 au camp Boiro, prison symbole du régime répressif du « père de l’indépendance » guinéenne, Sékou Touré. Diplômé d’ingénierie en Russie, expert du financement du développement agricole et de la gestion des risques, il a occupé plusieurs postes à responsabilités, dans le secteur privé ou dans des institutions internationales, y compris dans le système onusien.

« Refondation de l’Etat »

La junte a dit qu’elle rendrait le pouvoir aux civils après des élections à la fin d’une période de transition. Durant cette période transitoire, elle dit vouloir procéder à une « refondation de l’Etat », rédiger une nouvelle Constitution, lutter contre la corruption, réformer le système électoral et organiser des élections. Mais elle n’a toujours pas fixé la durée de cette transition ni précisé le contenu politique de ses plans.

Le nouveau chef du gouvernement devra proposer des ministres au colonel Doumbouya et, « dans un délai n’excédant pas trente jours » après la nomination des ministres, lui soumettre « le plan d’actions » du gouvernement, dispose la « charte », sorte d’acte fondamental de la transition publié le 27 septembre. Le gouvernement et son chef répondent entièrement au colonel Doumbouya, lequel approuve les noms proposés comme ministres et peut les révoquer, tout comme le chef du gouvernement. Le gouvernement « exécute et conduit la politique de la Nation définie par le président de la transition », dit la charte. Par ailleurs, aucun membre des institutions de transition ne pourra se présenter « ni aux élections nationales ni aux élections locales qui seront organisées pour marquer la fin de la transition ».

La Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), inquiète de l’instabilité et d’un effet de contagion des coups d’Etat, a réclamé des élections présidentielle et législatives sous six mois. Elle a décidé de geler les avoirs financiers des membres de la junte et de leur famille et de les interdire de voyage. Mais les experts conviennent que le colonel Doumbouya semble résolu à prendre le temps de mener à bien ses projets.

Source: Le Monde avec AFP





Mamady Doumbouya prête serment comme président de transition


Politique


Le commandant des forces spéciales qui ont renversé le président Alpha Condé le 5 septembre a été investi vendredi 1er octobre dans un contexte encore flou. 

Ce vendredi 1er octobre a été déclaré férié. Demain la Guinée va célébrer le soixante-troizième anniversaire de la déclaration d’indépendance vis-à-vis de la France. C’est la veille de cette date symbolique pour l’histoire du pays qu’a choisie le chef de la junte, le colonel Mamady Doumbouya, pour prêter serment comme président, au palais Mohammed-V de Conakry pour une période de transition à la durée et au contenu toujours inconnus.

Ce qu’il a promis

Le commandant des forces spéciales qui ont renversé le président Alpha Condé le 5 septembre, en uniforme d’apparat beige, portant béret rouge et lunettes noires, a juré, devant la Cour suprême et un parterre de personnalités guinéennes et de diplomates étrangers ainsi que sa mère et son épouse, « de préserver en toute loyauté la souveraineté nationale », de « consolider les acquis démocratiques, de garantir l’indépendance de la patrie et l’intégrité du territoire national ». 

Le colonel Doumbouya s’est de nouveau engagé au respect par la Guinée, pays pauvre mais aux considérables ressources minières, de tous ses « engagements nationaux et internationaux ». Il a par ailleurs assuré que, comme prévu par la « charte » de la transition, sorte d’acte fondamental publié lundi, ni lui ni aucun membre de la junte ou des organes de transition ne serait candidat aux futures élections.

Avant de lui faire prêter serment, le président de la Cour suprême Mamadou Sylla a comparé la tâche du colonel Doumbouya au pilotage d’un navire « chargé de beaucoup d’événements douloureux, d’exigences nombreuses et d’attentes immenses et urgentes ». Il l’a appelé à ne pas se laisser dérouter « par la force des vagues de la démagogie et la tempête du culte de la personnalité ».

Après deux coups de force au Mali voisin, le colonel Doumbouya a conduit le troisième putsch en un an en Afrique de l’Ouest, réalisé en quelques heures au prix d’un nombre indéterminé de vies humaines, les médias faisant état d’une dizaine à une vingtaine de morts.

Vers la restauration d’un pouvoir civil élu ?

Ce coup d’État s’inscrit dans l’histoire tourmentée de ce pays éprouvé, dirigé pendant des décennies depuis l’indépendance par des régimes autoritaires ou dictatoriaux. Largement condamné par la communauté internationale qui réclame la libération d’Alpha Condé, 83 ans, il a en revanche été salué par des scènes de liesse parmi une population exaspérée par la pauvreté, la corruption et la répression du régime déchu.

Dans l’assistance figuraient les ambassadeurs de Chine et de Russie et de pays africains, ainsi que le président de l’organe législatif de transition au Mali, le colonel Malick Diaw. Plusieurs pays occidentaux avaient limité leur présence à des diplomates de rang moindre. Le colonel Doumbouya a assigné pour mission à cette transition une « refondation de l’État », la rédaction d’une nouvelle Constitution, la lutte contre la corruption, la réforme du système électoral, l’organisation d’élections « libres, crédibles et transparentes » et la « réconciliation nationale ».

La junte a dit qu’elle rendrait le pouvoir aux civils après des élections à la fin d’une période de transition. Mais elle n’a jamais précisé la durée de cette transition, qui doit encore être fixée d’un « commun accord » entre les militaires et les forces vives du pays, ni précisé ses plans.

La junte s’affirme face aux exigences de la communauté internationale

Le colonel Doumbouya, colosse aux manières posées, toujours protégé de près par ses hommes et apparaissant toujours en public en treillis et coiffé de son béret, semble résolu à se laisser du temps, malgré les pressions internationales, conviennent les analystes.

La Communauté des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), inquiète de l’instabilité et d’un effet de contagion dans une région où un certain nombre d’États sont malmenés, a réclamé des élections présidentielle et législatives sous six mois. Elle a décidé de geler les avoirs financiers des membres de la junte et de leur famille et de les interdire de voyage.

Depuis son avènement, celui que les communiqués officiels désignaient déjà comme président de la République avant même son investiture, a multiplié les propos rassurants envers les investisseurs et des partenaires étrangers. Il a garanti le respect des contrats miniers et fait rouvrir toutes les frontières aériennes et terrestres.

La « charte » de la transition confirme le colonel Doumbouya comme le nouvel homme fort de la Guinée, « chef de l’État et chef suprême des armées », qui « détermine la politique de la Nation » et qui « peut prendre des ordonnances ». Le président Doumbouya nommera par décret un Premier ministre de transition, qu’il pourra révoquer.


Cet article est republié à partir de lepoint.fr. Lire l’original ICI





Charte de la Transition: ces dispositions (art. 46 et 55) ne sont susceptibles d’aucune révision

Dévoilée ce lundi 27 septembre 2021, la Charte de la transition est désormais le cadre juridique qui détermine la période de la transition en Guinée.

Ce qu’il faut retenir

Missions de la transition

Article 2 

  • La sauvegarde de l’intégrité du territoire national et la sécurité des personnes et de leurs biens ;
  • La refondation de l’Etat pour bâtir des institutions fortes, crédibles et légitimes garantissant un Etat de droit, un processus démocratique inclusif, apaisé et durable, gage d’un développement social, économique et culturel effectif ;
  • L’engagement de réformes majeures sur les plans économique, politique, électoral et administratif ;
  • Le renforcement de la cohésion nationale et la poursuite du processus de réconciliation nationale ;
  • Le renforcement de l’indépendance de la justice et la lutte contre l’impunité ;
  • La promotion et la protection des Droits de l’Homme et des libertés publiques ;
  • L’instauration d’une culture de bonne gouvernance et de citoyenneté responsable ;
  • L’élaboration d’une nouvelle Constitution et son adoption par référendum ;
  • L’organisation des élections locales et nationales libres, démocratiques et transparentes.


Président et membres du CNRD

Le Président et les membres du Comité National du Rassemblement pour le Développement ne peuvent faire acte de candidature ni aux élections nationales ni aux élections locales qui seront organisées pour marquer la fin de la Transition.

La présente disposition n’est susceptible d’aucune révision.

Article 46 de la Charte de la transition


Les organes de la Transition

Article 36

  • Le Comité National du Rassemblement pour le Développement (CNRD) ;
  • Le Président de la Transition ;
  • Le Gouvernement de la Transition ;
  • Le Conseil National de la Transition.

Premier Ministre et membres du Gouvernement

Le Premier Ministre et les membres du Gouvernement ne peuvent faire acte de candidature aux élections locales et nationales qui seront organisées pour marquer la fin de la Transition.

La présente disposition n’est susceptible d’aucune révision.

Article 55 de la Charte de la Transition


Durée de la Transition

La durée de la Transition sera fixée de commun accord entre les Forces Vives de la Nation et le Comité National du Rassemblement pour le Développement.

Article 77 de la Charte de la Transition


Membres du gouvernement et des institutions dissoutes

Les membres du gouvernement et ceux des institutions dissoutes à la date du 05 septembre 2021 ne peuvent être désignés au Conseil National de la Transition.

Article 60 (dernier paragraphe)


L’intégralité de la Charte de la Transition, à télécharger ICI

Sékou Chérif Diallo




Guinée: les putschistes font bonne mine aux investisseurs

Gouvernance

Republication Alternatives Economiques n°416 – 10/2021


Les exemptions fiscales accordées aux investisseurs miniers privent l’Etat de recettes, estime le Fonds monétaire international. Les nouveaux maîtres du pays n’ont pas prévu d’y remédier.

On ne plaisante pas avec le portefeuille. Après avoir chassé du pouvoir le président Alpha Condé, qui avait été réélu l’an dernier pour un troisième mandat à l’issue d’un coup de force institutionnel, le colonel Mamady Doumbouya et ses hommes se sont efforcés de rassurer la population guinéenne sur leurs intentions démocratiques.

Dans le même souffle, ils ont aussi envoyé un message aux investisseurs du secteur minier : les contrats signés par les précédentes autorités seront respectés. Et pour cause : les ventes de bauxite, d’or et de diamants à l’étranger représentent plus de 80 % des exportations de la Guinée. Et fournissent 30 % des recettes de l’Etat, selon l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE).

Panique à Pékin

Rompant d’ailleurs de façon spectaculaire avec sa doctrine de non-ingérence dans les affaires intérieures des autres pays, le gouvernement chinois s’est opposé au coup d’Etat le 6 septembre et a appelé à la libération du président Alpha Condé qui s’était rapproché du géant asiatique ces dernières années. De fait, Pékin est aujourd’hui extrêmement dépendant de la Guinée, qui lui fournit près de la moitié de son approvisionnement en bauxite, le minerai qui permet de fabriquer l’aluminium dont la Chine est le premier producteur mondial.

Si la bauxite représente environ 60 % de la production minière guinéenne, devant l’or (34 %), et que le pays détient un tiers des réserves mondiales connues, ce n’est pas le seul minerai dont la Guinée soit riche. Elle possède également le plus grand gisement de fer inexploité de la planète, celui de Simandou. Selon le Fonds monétaire international (FMI), lorsque ce gisement, pour lequel une concession de vingt-cinq ans a été accordée en 2019 à un consortium détenu à 90 % par des intérêts privés singapouriens, chinois et guinéens, sera exploité, le pays pourrait devenir le deuxième exportateur mondial. Mais cela suppose des investissements considérables (voie ferrée, tunnels, ponts…), Simandou étant distant de 650 kilomètres de la côte, point d’expédition vers les marchés étrangers.

Contrats juteux

Pour que les investisseurs continuent à mettre de l’argent dans les mines guinéennes, encore faut-il qu’ils aient confiance dans la stabilité du pays, et surtout des contrats. Des contrats qui, ces dernières années il est vrai, ont été fort avantageux pour les partenaires de la Guinée, souligne le FMI. Alors que le code minier a été réformé en 2013, nombre de dérogations, fiscales surtout, ont été accordées aux investisseurs. Aux yeux du FMI, elles ne se justifient guère, car les concurrents de la Guinée sur le marché de la bauxite n’accordent pas des conditions plus avantageuses et la qualité de son minerai est supérieure à celle de ses rivaux.

Evaluant la gestion publique du secteur minier, l’ONG américaine Natural Resource Governance Institute estime, de son côté, que « le gouvernement pourrait accélérer la lutte contre les conflits d’intérêts et la corruption en rendant opérationnelles la divulgation de la propriété effective des titres miniers et les déclarations des intérêts financiers des personnels de l’Etat dans les entreprises du secteur ». A coup sûr. En attendant, les exemptions fiscales accordées aux investisseurs privent l’Etat de recettes. Si elles étaient réduites, calcule le FMI, cela permettrait de multiplier par quatre le budget du ministère de l’Agriculture, par exemple. Or, l’agriculture emploie 60 % de la population, contre 6,5 % pour le secteur minier industriel, dans un pays qui en 2019 se classait au 178e rang mondial sur 189 pour l’indice du développement humain. Pas tout à fait au sous-sol donc, mais pas loin.


Cet article est republié à partir de alternatives-economiques.fr. Lire l’original ICI.





Edito : Après la chute du dictateur, le scénario de la suite

Politique

Se préparer à vivre une période de confusion, de suspicions et de dérapages avant de retrouver le bon chemin.

Les coups d’état ont un cheminement presque identique. 

Acte 1: les nouveaux maîtres cherchent l’adhésion populaire (facile à obtenir dans un contexte de ras-le-bol général).

Acte 2: il faut trouver les ressources humaines pour assurer la continuité de l’état. Les premiers couacs commencent à ce niveau. Les populations ont des préférences, des profils, voire des noms de cadres qui ont su garder une certaine crédibilité dans un environnement de “tous pourris”, mais elles ont surtout des noms à bannir, des cadres (fonctionnaires et autres courtisans de palais) à effacer du répertoire politique national. Le plus souvent, les nouveaux maîtres ont aussi des accointances avec certains de ces indésirables car les talents particuliers de ces derniers sont le plus souvent utiles pour une junte qui ambitionnerait de se “sucrer” avant de partir tout en assurant ses arrières par une transmission négociée du pouvoir. Le choix des collaborateurs sera le premier indicateur qui définira l’évolution du capital confiance. 

Acte 3: mobiliser les ressources financières. Ils le savent, les audits pour récupérer l’argent « détourné » prennent du temps, les investisseurs attendent d’avoir une certaine lisibilité, les partenaires financiers demandent des garanties…, le tout dans un contexte où l’état avait déjà du mal à mobiliser des ressources internes. La solution classique avec son lot d’opacité consiste à se tourner vers des potentiels parrains financiers nationaux ou étrangers ou les deux à la fois. En contrepartie, la main qui donne est celle qui dicte les choix politiques. Le plus souvent, ces choix politiques trahissent les objectifs de départ.

Acte 4: l’impossible collaboration avec l’opposition politique. Je pouvais dire “difficile collaboration”. Mais non, elle sera “impossible”. Même si, dans un premier temps, chaque camp jouera le jeu habituel du consensus de façade mais très vite, ils reviendront à leur nature “moi et personne d’autre”.

En prenant acte de la nouvelle situation, la classe politique compte jouer un rôle de premier plan dans cette nouvelle configuration. Elle part du principe qu’une transition est limitée dans le temps, et à terme, les nouveaux maîtres doivent quitter pour laisser les compétiteurs politiques “agréés” sur le ring avec un arbitrage impartial. Mais l’histoire politique guinéenne nous enseigne que rien ne se passe comme prévu. La durée de la transition (les premiers signes du divorce), les acteurs, les instruments, le chronogramme, les priorités, les manœuvres politiques … tous ces éléments contribuent à alimenter les suspicions et conduisent le plus souvent vers une impasse. Surtout si les nouveaux maîtres possèdent un agenda de transmission du pouvoir en torpillant les règles du jeu démocratique. C’est du déjà vu et du déjà vécu.

Acte 5: la conjoncture économique s’invite dans les ménages. Pour un spécialiste, les effets du changement se sentiront au bout de plusieurs mois voire des années. Pour le citoyen lambda, la chute du régime Condé doit se traduire par l’amélioration des conditions de vie des populations. La transition n’est pas une période de développement, c’est l’analyse de l’intellectuel. Le peuple qui est sorti le 6 septembre est le même peuple qui sortira pour exprimer de nouveau son ras le bol. L’attitude des nouvelles autorités face à une telle éventualité définira la trajectoire de cette nouvelle aventure aux innombrables incertitudes.

Acte 6: retour à la case départ ou le début d’une véritable rupture.

Et la justice ? Quand ? Avec quels acteurs (les nouveaux maîtres ou ceux post transition) ? Quels dossiers ? Quel ordre de priorité ?

Certes, des exceptions existent et j’espère me tromper. Cependant, il est évident qu’ils (les nouveaux maîtres) ne feront pas pire que le régime Alpha Condé car le record de ce dernier en termes d’exactions, de violences, de corruption, de médiocrité est difficilement atteignable.

Mais vu l’ampleur des dégâts incommensurables dans la société guinéenne, il nous reste encore des périodes de tâtonnements et d’errements politiques avant de retrouver le bon chemin, en d’autres termes, soigner une société profondément malade dans l’espoir de «fabriquer» le guinéen nouveau. Désolé de gâcher la fête au lendemain de la chute du dernier dictateur des rivières du sud mais gardons toujours notre lucidité tout en restant optimiste.

Sékou Chérif Diallo




Alpha Condé: la chute d’un dictateur


Politique


Plusieurs soldats mutins des forces spéciales guinéennes ont annoncé, dimanche, en Guinée, à la télévision nationale, la dissolution de la Constitution et du gouvernement dans ce qui s’apparente à un putsch. Mais le ministère de la Défense guinéen a déclaré que les forces de sécurité étaient en train de rétablir l’ordre.

En Guinée, des officiers des forces spéciales ont affirmé, dimanche 5 septembre, avoir capturé le chef de l’État Alpha Condé et avoir dissous les institutions, mais une grande confusion régnait à Conakry sur qui était maître de la situation.

Le ministère de la Défense a ainsi assuré avoir repoussé l’attaque des forces spéciales contre la présidence, malgré la diffusion d’une vidéo montrant le président Condé entre les mains des putschistes.

“Nous avons décidé après avoir pris le président, qui est actuellement avec nous (…) de dissoudre la Constitution en vigueur, de dissoudre les institutions; nous avons décidé aussi de dissoudre le gouvernement et la fermeture des frontières terrestres et aériennes”, a déclaré le chef des forces spéciales, le lieutenant-colonel Mamady Doumbouya, au côté de putschistes en uniforme et en armes, dans une vidéo adressée à un correspondant de l’AFP.

Dans une interview exclusive accordée à France 24, Mamady Doumbouya a également affirmé que ses hommes détenaient Alpha Condé. “Le président est avec nous. Il est dans un lieu sûr. Il a déjà vu un médecin”, a-t-il déclaré. Dénonçant la “gabegie”, le lieutenant-colonel Doumbouya, drapé dans un drapeau guinéen, a ensuite réitéré cette déclaration à la télévision nationale peu après 14 h GMT, interrompant les programmes habituels.



Les putschistes ont également diffusé une vidéo, non authentifiée, du président Condé entre leurs mains. Ils lui demandent s’il a été maltraité, et Alpha Condé, en jeans et chemise froissée dans un canapé, refuse de leur répondre.

“Les forces de l’ordre affirment que les frontières sont fermées, que la Constitution est dissoute. Dans quelques heures, ils mettront un gouvernement de transition en place. [Mamady Doumbouya] a exigé qu’on signale qu’ils ne sont pas là pour s’éterniser au pouvoir mais pour planifier une transition”, a expliqué, dimanche, Malick Diakité, correspondant de France 24 à Conakry. 

Des tirs soutenus et des militaires dans les rues 

De son côté, le ministère de la Défense a affirmé dans un communiqué que “les insurgés (avaient) semé la peur” à Conakry avant de prendre la direction du palais présidentiel, mais que “la garde présidentielle, appuyée par les forces de défense et de sécurité, loyalistes et républicaines, ont contenu la menace et repoussé le groupe d’assaillants”.

Tôt dans la matinée, des tirs nourris d’armes automatiques avaient retenti sur la presqu’île de Kaloum, centre névralgique de Conakry, où siègent la présidence, les institutions et les bureaux d’affaires de ce pays d’Afrique de l’Ouest en proie depuis des mois à une grave crise économique et politique. 

La présence des forces armées dans les rues, a été confirmée par Malick Diakité notre correspondant. “La population est massivement sortie dans la rue. Les forces de l’ordre sont en train de se promener dans la rue avec des blindés et ils sont applaudis par la population”, rapporte-il. 

“J’ai vu une colonne de véhicules militaires à bord desquels des soldats surexcités tiraient en l’air et entonnaient des slogans militaires”, a déclaré à l’AFP une habitante du quartier de Tombo, proche du centre de la capitale. “Les soldats étaient tous cagoulés” et se dirigeaient vers Kaloum, a-t-elle précisé sous le couvert de l’anonymat pour des raisons de sécurité.

Au moins deux blessés, selon des témoins

Un habitant de la banlieue de Coléah a indiqué à l’AFP avoir “entendu des tirs” tôt dans la matinée. “Je me suis précipité vers la fenêtre, j’ai vu des jeeps militaires qui roulaient à vive allure vers le centre de Kaloum”, a-t-il dit.

Les tensions pourraient avoir été provoquées par une tentative de mise à l’écart du commandant des forces spéciales, sur fond de jalousies au sein des forces armées envers cette unité bénéficiant de moyens supérieurs aux autres forces de sécurité, a expliqué un diplomate occidental s’exprimant sous le couvert de l’anonymat.

Des habitants joints au téléphone à Kaloum ont fait état de tirs soutenus, disant avoir vu de nombreux soldats intimant aux résidents de rentrer chez eux et de ne pas en sortir. Selon des témoins contactés par Reuters, deux civils au moins ont été blessés par balles.

Alpha Condé, qui est âgé de 83 ans, a été réélu en octobre dernier pour un troisième mandat de cinq ans à la suite d’une réforme de la Constitution vivement critiquée par l’opposition. Plusieurs dizaines de personnes sont mortes dans des violences liées au scrutin.


Cet article est republié à partir de france24.com sous le titre: Guinée : les forces spéciales affirment détenir le président Alpha Condé. Lire l’original ici. Avec AFP et Reuters