Répression meurtrière des manifestations: le FNDC alerte la CPI et transmet une liste des auteurs


Politique


Dans un communiqué, le ministre de la justice présente le bilan officiel des manifestations du 28 et 29 juillet dernier à Conakry, « Ces manifestations ont engendré cinq (5) morts, selon les statistiques du service de médecine légale de l’hôpital national Ignace Deen remonté à titre d’information par le Parquet général au Garde des Sceaux, Ministre de la Justice et des Droits de l’Homme ainsi que de nombreux blessés civiles et militaires et d’importants dégâts matériels ».

Au même moment des poursuites judiciaires sont engagées contre les organisateurs et responsables du FNDC. Dans ce bras de fer, le FNDC adresse au bureau du procureur général de la Cour pénal internationale (CPI) un document intitulé « Signalement de la répression meurtrière des manifestations citoyenne du FNDC » avec une liste de 13 responsables de la junte présentés comme les auteurs de la répression.

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FNDC Signalement





CPI: signalement de faits susceptibles de revêtir la qualification de crimes contre l’humanité en Guinée [Cabinet Bourdon & Associés]


En qualité de Conseils des membres du FNDC, Maîtres William BOURDON (Avocat associé fondateur, inscrit au Barreau de Paris depuis 1980) et Vincent BRENGARTH (Avocat collaborateur, inscrit au barreau de Paris depuis 2015) du Cabinet Bourdon & Associés, écrivent à Madame le Procureur de la Cour pénale internationale pour attirer son attention « sur la situation extrêmement préoccupante dans laquelle se trouve la République de Guinée à l’approche de l’élection présidentielle de 2020 en application de l’article 15 du Statut de Rome. »


En menant une répression violente contre l’opposition politique, le gouvernement du Président Alpha CONDE s’est en effet rendu coupable de violations graves et répétées de droits fondamentaux d’une partie de la population.

Extrait de la lettre du Cabinet Bourdin & Associés adressée à la Madame la Procureur de la CPI


Madame le Procureur,

Nous avons l’honneur de vous écrire en qualité de Conseils des membres du FRONT NATIONAL DE DEFENSE DE LA CONSTITUTION («FNDC»), mouvement citoyen créée le 3 avril 2019 et réunissant les principaux partis d’opposition, des organisations de la société civile et des syndicats, qui compte parmi ses membres M. Adourahamane SANO, M. Sékou KOUNDOUNO, M. Ibrahima DIALLO, M. Abdoul Kabélé CAMARA.

Ce Front a notamment pour objectif de dénoncer toutes les formes de violation de la Constitution, des lois de la République et d’œuvrer à la réunion de conditions idoines pour l’organisation d’élections transparentes, libres et justes.

Par la présente, nous souhaitons attirer votre attention sur la situation extrêmement préoccupante dans laquelle se trouve la République de Guinée à l’approche de l’élection présidentielle de 2020 en application de l’article 15 du Statut de Rome.

En menant une répression violente contre l’opposition politique, le gouvernement du Président Alpha CONDE s’est en effet rendu coupable de violations graves et répétées de droits fondamentaux d’une partie de la population.

Ces persécutions, qui visent tout particulièrement le FRONT NATIONAL DE DEFENSE DE LA CONSTITUTION et ses partisans, sont fondées sur des considérations politiques et ethniques, qui semblent justifier la qualification de crimes contre l’humanité.

Alors que cette répression s’accentue depuis quelques mois, la communauté internationale s’inquiète de voir le pays sombrer à nouveau dans une spirale de violences, susceptible de mener à des crimes encore plus dramatiques, à l’image des faits commis par la junte militaire le 28 septembre 2009, dont vous êtes déjà saisie.

Dans ce contexte alarmant, nous vous prions de bien vouloir donner à la présente toutes les suites qui vous sembleront opportunes, et notamment de diligenter, si les conditions vous semblent réunies–ce qui nous semble être le cas–, un examen préliminaire sur les faits dénoncés.

Bien entendu, l’ensemble des membres du FRONT NATIONAL DE DEFENSE DE LA CONSTITUTION se tient à votre disposition, le cas échéant, pour vous apporter tous documents ou informations que vous jugeriez utiles à la manifestation de la vérité en plus des développements ci-après contenus.


Lisez l’intégralité du document de 51 pages






La procureure de la CPI met en garde contre l’escalade de la violence en Guinée

La procureure de la Cour pénale internationale (CPI) a mis en garde
lundi les responsables de l’escalade de la violence en Guinée, exhortant
le gouvernement et l’opposition à renouer le dialogue après des
manifestations sanglantes dans ce pays.


Les tensions
sont fortes en Guinée après des semaines de manifestations organisées
par l’opposition qui soupçonne le président Alpha Condé de vouloir
briguer un troisième mandat.

«Suite aux informations faisant état de nombreux épisodes de violence en Guinée au cours des dernières semaines, j’appelle tous les responsables et leurs sympathisants à s’abstenir de la violence et à reprendre le dialogue pour éviter de nouvelles victimes», a déclaré la procureure de la CPI, Mme Fatou Bensouda.

«Toute personne qui commet, ordonne, incite, encourage ou contribue de toute autre manière à commettre des crimes atroces (…) est passible de poursuites par les tribunaux guinéens ou par la CPI», a-t-elle mis en garde dans un communiqué.

Au total, au moins 16 civils et un gendarme ont trouvé la mort au cours de l’intense mouvement de contestation auquel la Guinée – un petit pays pauvre de 13 millions d’habitants – est en proie depuis le 14 octobre à l’instigation du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC). Des dizaines d’autres personnes ont été blessées, des dizaines arrêtées et jugées.

Le FNDC veut faire barrage au projet prêté au président Condé de
briguer sa propre succession en 2020 et de réviser pour cela la
Constitution qui limite actuellement à deux le nombre des mandats
présidentiels.

A 81 ans, M. Condé entretient le flou sur ses
intentions, mais a entamé en septembre des consultations sur la
Constitution. L’opposition accuse de dérive «dictatoriale» l’ancien
opposant historique qui fut le premier président démocratiquement élu en
2010, réélu en 2015, après des décennies de régimes autoritaires et
militaires.

La communauté internationale s’inquiète d’une escalade dans un pays coutumier des manifestations et des répressions brutales.

En outre, Mme Bensouda a ajouté que son bureau s’était rendu en Guinée fin octobre pour faire le point sur l’enquête liée au massacre de plus de 150 partisans de l’opposition, il y a dix ans.

Établie à La Haye, la CPI a ouvert une enquête préliminaire sur le massacre perpétré le 28 septembre 2009 dans l’enceinte du plus grand stade de Conakry lorsque les forces de sécurité ont tiré sur une foule qui manifestait contre le chef de la junte Moussa Dadis Camara. Plus de 100 femmes ont en outre été violées.

Mme Bensouda s’est
déclarée encouragée par des déclarations du ministre guinéen de la
Justice, Mohamed Lamine Fofana, au cours de la visite de son équipe,
annonçant que le procès des responsables du massacre de 2009 devrait
commencer au plus tard en juin 2020.

«Cela fait maintenant plus de dix ans que ces crimes horribles ont eu lieu au stade de Conakry», a déclaré Mme Bensouda. «Les victimes et les communautés qui ont été touchées méritent que justice soit faite», a-t-elle dit.

La Croix