Mali: la junte riposte aux sanctions de la CEDEAO et l’UEMOA


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Le gouvernement malien, en réponse aux sanctions économiques et financières de la CEDEAO et de l’UEMOA prises à son encontre, décide de fermer ses frontières terrestres et aériennes avec les pays de la CEDEAO.

Tout en condamnant ces sanctions qu’il juge illégales, le gouvernement malien, dans un communiqué signé du ministre de l’Administration territoriale et de la décentralisation, colonel Abdoulaye Maïga, dit regretter que des organisations sous régionales ouest-africaines se fassent « instrumentaliser par des puissances extra régionales au desseins inavoués ».





Mali : des sanctions « très dures » adoptées par la Cédéao


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Le nouveau calendrier proposé par Bamako n’aura pas suffi à convaincre les dirigeants de la Cédéao. Les États d’Afrique de l’Ouest ont adopté des sanctions « très dures » ce 9 janvier à l’encontre de la junte au pouvoir. Ces mesures sont comparables à celles prises après le putsch de 2020.

Lors du sommet extraordinaire des dirigeants de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cédéao), qui s’est tenu 9 janvier, des sanctions « très dures » ont été adoptées en raison du non-respect par la junte au pouvoir au Mali de l’échéance de février pour organiser des élections et ramener les civils au pouvoir.

Parmi elles :

  • la fermeture des frontières entre le Mali et les pays membres de la Cédéao,
  • le gel des actifs maliens au sein de la Banque Centrale des États d’Afrique de l’Ouest,
  • la suspension des transactions sauf pour les produits de première nécessité et pharmaceutiques.
  • coupure des aides financières
  • rappel des ambassadeurs des pays membres au Mali

« Ces sanctions seront appliquées immédiatement. Elles seront progressivement levées uniquement après l’obtention d’un chronogramme satisfaisant soit finalisé », explique la Cédéao dans un communiqué. 

Ces sanctions ont été prises malgré le nouveau calendrier présenté plus tôt par les envoyés maliens. De cette manière, ils ont exprimé leur volonté de « maintenir le dialogue et une bonne coopération avec la Cédéao ». Un haut responsable ghanéen, dont le pays assure actuellement la présidence de la Cédéao a estimé que ce calendrier était « de la rigolade. » Initialement, la transition prévue par la junte était de cinq ans. Ce nouveau calendrier est raccourci à quatre ans.

Les sanctions adoptées par les dirigeants de la Cédéao sont comparables à celles prises après le putsch d’août 2020, selon un haut responsable participant au sommet. Après le coup d’État, la Cédéao avait imposé la fermeture des frontières des États membres avec le Mali ainsi qu’un embargo sur les échanges commerciaux et financiers, à l’exception des produits de première nécessité.

Dans le communiqué publié après la réunion de la Cédéao, les dirigeants « regrettent le manque de volonté politique des autorités de transition, qui a conduit à l’absence de progrès tangible dans la préparation aux élections. » Il est aussi précisé que les chefs d’État trouvent le chronogramme proposé la veille en urgence « inacceptable ».

Quel était le calendrier initial ? 

Au pouvoir depuis le coup d’État d’août 2020, conforté par celui de mai 2021, la junte militaire avait pris l’engagement de remettre le pouvoir au peuple. Pour cela, ils devaient tenir des élections présidentielles et législatives au mois de février 2022. 

Cependant, le colonel Assimi Goïta, dirigeant de la junte avait exprimé son incapacité à respecter le calendrier établi. La raison ? L’insécurité persistante dans le pays liée aux violences, principalement djihadistes. Les Assises nationales ont alors été chargées de constituer un nouveau calendrier. Le 30 décembre 2021, les participants aux Assises ont proposé de prolonger la transition de la junte militaire « de six mois à cinq ans. » Le pouvoir malien a tranché en optant pour une prolongation de la transition pendant 5 ans.

Cette proposition a été rejetée par plusieurs organisations politiques maliennes le 2 janvier 2022. Dans un communiqué, les organisations qualifient ce chronogramme d’ « unilatéral et déraisonnable », et estime qu’il « viole la charte de la transition (…) et ne saurait être en aucun cas une aspiration profonde au peuple malien. » Les dirigeants Ouest-africains se réunissent donc ce 9 janvier pour examiner le calendrier des autorités maliennes. 

Un double-sommet extraordinaire 

En plus du sommet extraordinaire de la Cédéao, une rencontre des chefs d’État de l’Union monétaire ouest-africaine (Uemoa) est aussi prévue. Les huit pays de l’Uemoa sont aussi membres de la Cédéao. 

Leur sommet faisant prélude à celui de la Cédéao, il peut signifier qu’une action concertée de ces pays peut être mise en place à l’encontre de la junte militaire malienne. Au cours de leur réunion considérée comme préparant le terrain à une action concertée, les dirigeants des Etats de l’UEMOA ont affiché leur “fermeté” à l’encontre de la junte, a dit un participant sous le couvert de l’anonymat.

Par ailleurs, la Cédéao a déjà imposé des sanctions. 150 personnalités, que la Cédéao juge coupable de faire obstruction aux élections, se sont vues imposer un gel de leur avoir financier et une interdiction de voyager.

La junte militaire malienne devait s’attendre à des sanctions supplémentaires. Le 12 décembre, la Cédéao avait menacé de sanctions « économiques et financières » supplémentaires. « La prorogation de la durée de la transition à cinq ans préoccupe l’ensemble de la région ouest- africaine », avait déclaré le président en exercice de l’Uemoa, le chef de l’Etat burkinabè Roch Marc Christian Kaboré dans son discours d’ouverture. Il a paru peu enclin à accorder beaucoup de temps aux colonels Maliens, exprimant « la conviction que toutes les réformes politiques, économiques et sociales visant la refondation du Mali ne pourraient être conduites que par des autorités démocratiquement élues. »

Une situation qui divise

À la veille du sommet des chefs d’État d’Afrique de l’Ouest, des manifestations ont eu lieu à Bamako. D’un côté, les partisans du pouvoir militaire en place. De l’autre, les opposants au programme de la junte militaire. Ces derniers appellent les dirigeants militaires à prendre des dispositions pour éviter d’être victimes de nouvelles sanctions. Selon eux, c’est le peuple malien qui sera le premier à pâtir, en cas de sanctions. 

De leur côté, les soutiens de la junte militaire estiment toutefois que la situation sécuritaire du pays justifie le calendrier de transition proposé. En revanche, ils craignent aussi les sanctions. Ils appellent donc les dirigeants de la Cédéao à se montrer cléments. 


Cet article est republié à partir de information.tv5monde.com. Lire l’original ici





La CEDEAO « encourage les autorités de la Transition à soumettre rapidement un chronogramme »


3eme SOMMET EXTRAORDINAIRE DE LA CONFERENCE DES CHEFS D’ETAT ET DE GOUVERNEMENT DE LA CEDEAO SUR LA SITUATION AU MALI ET EN GUINEE

La Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) s’est réunie en session extraordinaire, le 7 novembre 2021 à Accra, République du Ghana, sous la présidence de S.E.M. Nana Addo Dankwa AKUFO-ADDO, Président de la République du Ghana, et Président en exercice de la Conférence. Ladite session avait pour objet d’évaluer l’évolution de la situation politique en République de Guinée et en République du Mali.

Étaient présents à cette Session, plusieurs Chefs d’État et de Gouvernement.

A l’issue des délibérations, la Conférence a entériné les principales conclusions contenues dans les memoranda sur la situation politique en République de Guinée et en République du Mali. Lire et télécharger le communiqué final ICI.

Extraits de quelques conclusions

Transition guinéenne

Elle prend note des derniers développements intervenus en Guinée, notamment l’adoption de la Charte de la Transition, la nomination d’un Premier Ministre civil et la formation du Gouvernement de Transition. Elle encourage les Autorités de la Transition à soumettre rapidement un chronogramme détaillé d’activités à entreprendre dans le cadre de la transition, en vue d’assurer la tenue d’élections, conformément aux décisions issues du Sommet extraordinaire des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO, tenu le 16 septembre 2021.

La Conférence décide de nommer S.E. le Dr Mohamed Ibn Chambas Envoyé spécial en Guinée, dans le but de renforcer le dialogue avec les Autorités de la Transition et de favoriser la réussite d’un processus de transition dans les plus brefs délais.


Transition malienne

” Sur le plan politique, le Président de la CEDEAO a informé la Conférence de la notification officielle par les Autorités de Transition de leur incapacité à respecter la date limite de transition de février 2022. La Conférence déplore vivement l’absence de progrès dans la préparation des élections, notamment l’absence d’un calendrier détaillé des activités pour la tenue des élections aux dates convenues.”

” La Conférence rappelle la nécessité du respect du calendrier de la transition pour les élections prévues le 27 février 2022, et demande aux Autorités de la Transition d’œuvrer dans ce sens afin d’assurer le retour rapide à l’ordre constitutionnel. Par conséquent, la Conférence appelle la communauté internationale à prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce que les autorités de transition respectent leur engagement en faveur d’un retour rapide à l’ordre constitutionnel.





Mali, un coup dans le coup [J.H Jezequel, expert Crisis Group]


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Des militaires ont arrêté les chefs de l’Etat et du gouvernement de transition maliens installés suite au coup d’Etat militaire d’août 2020. L’expert de Crisis Group Jean-Hervé Jezequel détaille les retombées possibles de ce second putsch dans un pays déjà fragilisé par le conflit avec les jihadistes.

Que sait-on de ce coup d’Etat au Mali, le second en neuf mois ?

Le lundi 24 mai, le président de la transition Bah N’Daw, son Premier ministre Moctar Ouane et quelques autres responsables maliens ont été arrêtés et conduits au camp militaire de Kati, près de Bamako. Cette arrestation a été décidée peu après la nomination d’un nouveau gouvernement, dont la composition a été âprement négociée pendant plus d’une semaine mais dans lequel ne figuraient plus les colonels Sadio Camara et Modibo Koné, respectivement ministres de la Défense et de la Sécurité. Ces deux officiers de la garde nationale sont aussi membres dirigeants de l’ex-Comité National de Salut du Peuple (CNSP), le groupe à l’origine du coup d’État du 18 août 2020 et officiellement dissous en janvier 2021.  

Le lendemain, le colonel Assimi Goïta, chef de l’ex-CNSP et actuel vice-président de la transition, a fait lire un communiqué à la télévision nationale dans lequel il annonce « placer hors de leurs prérogatives » le président et son Premier ministre. Il les accuse d’incompétence et surtout d’avoir constitué un nouveau gouvernement sans le consulter – ce qui est peu probable étant donné la durée des négociations pour former le gouvernement – violant ainsi la charte de la transition, un texte adopté en septembre 2020 qui lui donne des prérogatives en matière de défense et de sécurité. Cette même charte invoquée par le colonel Goïta ne lui donne pourtant aucun pouvoir de suspendre le président ou le Premier ministre. A ce titre, le coup de force des militaires de l’ex-CNSP est bien une tentative de coup d’Etat pour reprendre le contrôle d’une transition en train de leur échapper.

Ces derniers jours, les relations s’étaient tendues entre, d’une part, les anciens putschistes et, d’autre part, le président Bah N’Daw, lui-même ancien militaire à la retraite, et Moctar Ouane, son Premier ministre. Ces derniers avaient l’intention de mettre en place un gouvernement plus inclusif, pour construire une union plus forte autour de la transition sur fond de tensions sociales dans le pays, et notamment d’une grève générale décrétée par la principale union syndicale du pays. N’Daw et Ouane ont également saisi cette occasion pour tenter de réduire la forte influence que les militaires de l’ex-CNSP avaient établie sur les institutions de transition et qui, selon plusieurs sources consultées par Crisis Group, limitait considérablement les marges de manœuvre du chef de gouvernement.

Ces tensions entre autorités civiles de transition et ex-putschistes rappellent étrangement l’éviction forcée du Premier ministre Cheick Modibo Diarra en décembre 2012 par des putschistes quelques mois après leur coup d’Etat contre le président Touré. Les militaires de l’ex-CNSP, que des officiels occidentaux décrivaient il y a encore quelques mois comme des « officiers éclairés », ne se comportent finalement pas mieux que les sous-officiers ayant pris le pouvoir en 2012. Le Mali donne parfois l’impression d’un inquiétant retour à la case départ.

Quels sont les risques pour le Mali ?

En août 2020, la destitution du président élu Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) par le CNSP avait suscité très peu de violences, en grande partie parce que le régime était épuisé et que le départ d’IBK a été accueilli avec un certain soulagement par une large partie de la population après des semaines de manifestations populaires. Cette fois, il s’agit d’une confiscation du pouvoir par des militaires dont l’action bénéficie d’un bien moindre soutien populaire. Des rumeurs font état de tensions au sein de l’armée, où ce “coup dans le coup” ne fait pas l’unanimité. Jusqu’ici les casernes restent tranquilles, mais on ne peut écarter le risque de combats fratricides entre forces de sécurité, comme ce fut le cas après le coup d’Etat de mars 2012. Par ailleurs, il n’y a pour le moment pas de mobilisation de la société civile dans la rue pour défendre les autorités suspendues, mais plusieurs associations, partis politiques et personnalités se sont publiquement prononcées pour exiger leur libération. A l’inverse, peu d’organisations maliennes ont exprimé un soutien en faveur de l’action des militaires. Beaucoup, comme la Coordination des mouvements, associations et sympathisant (CMAS) de l’influent imam Mahmoud Dicko, réservent encore leur jugement ou mènent d’intenses négociations avec les miliaires de l’ex-CNSP, sans doute dans l’espoir d’obtenir des positions d‘influence dans un éventuel prochain gouvernement.

En effet, si la démission forcée de N’Daw et Ouane le 26 mai se confirme, les militaires de l’ex-CNSP vont maintenant vouloir consolider leur coup en faisant nommer un nouveau Premier ministre et un nouveau président de la transition. Ils pourraient trouver un chef du gouvernement au sein du Mouvement du 5 juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP), une coalition hétéroclite de partis et d’associations qui a joué un rôle clé dans le renversement du président Keita mais avait ensuite été divisé et marginalisé par le CNSP au moment de la création des institutions de transition. Ils comptent sur une telle alliance avec des forces politiques maliennes pour convaincre les acteurs internationaux de les laisser poursuivre la transition. Le vice-président, dans une tentative d’amadouer les acteurs internationaux, a d’ailleurs annoncé après l’arrestation du président qu’il comptait toujours terminer la transition en respectant le calendrier négocié avec la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) en septembre 2020. 

Les jours qui viennent vont donc être déterminants et une situation de blocage politique durable est l’un des scénarios envisageables. Mais quelle que soit l’issue des évènements actuels, cette nouvelle crise met à jour l’absence d’une coalition forte soutenant l’action de la transition et notamment son ambition déclarée de réformer le système politique malien. C’est là l’élément peut-être le plus inquiétant : après avoir traversé toutes ces crises, le Mali ne sait toujours pas quelles forces politiques sont capables de porter le changement dont le pays a besoin.

Quelles ont été les réactions internationales ?

La condamnation internationale est forte et jusqu’ici unanime. Les principaux partenaires de la transition du Mali, la Cedeao, l’Union africaine, la Mission des Nations unies au Mali (Minusma), la France, l’Union européenne et les États-Unis, ont rejeté cette tentative de coup d’Etat. Les militaires de l’ex-CNSP s’y attendaient sans doute mais ils ont pris le risque, estimant peut-être que les même acteurs internationaux qui ont laissé une junte militaire s’installer récemment au pouvoir au Tchad après la mort du président Idriss Déby, finiront également par composer avec eux comme ils l’ont d’ailleurs fait en août dernier.

Une mission de la Cedeao est déjà arrivée à Bamako pour rencontrer les différents protagonistes et tenter de dénouer cette crise. Les partenaires internationaux du Mali savent cependant que les outils de pression dont ils disposent sont à double tranchant. Comme en août 2020, la Cedeao pourrait suspendre le Mali de ses institutions et imposer des sanctions économiques qui pèsent sur les décideurs maliens. Mais ces mesures frappent aussi la population malienne, au risque d’aggraver les tensions internes et même de nourrir un sentiment de rejet des partenaires du Mali. L’an passé, ces sanctions avaient permis d’arracher d’importants compromis aux militaires du CNSP, mais sans les écarter de l’exercice réel du pouvoir. Des sanctions internationales ciblées sur les responsables du coup d’Etat pourraient aussi être adoptées, mais elles sont peu susceptibles d’avoir un impact à court terme et pourraient même entrainer la suspension des programmes de collaboration avec les autorités maliennes si les personnalités sanctionnées se maintiennent au pouvoir. Cette suspension possible des programmes de collaboration était déjà la hantise de nombreux bailleurs de fonds suite au putsch d’août 2020.

Les acteurs internationaux devraient continuer à refuser la confiscation du pouvoir par les militaires de l’ex-CNSP et faire pression pour que le pays renoue avec un pouvoir civil qui n’en soit pas l’otage. Ils ne peuvent cependant peser que s’ils restent unis. En août 2020, certains partenaires du Mali avaient trop précocement envoyé aux militaires le signal qu’ils pourraient garder une influence déterminante sur la conduite des affaires du pays. 

Les partenaires internationaux ont aujourd’hui deux options principales, dont aucune n’est sans risque : soit, ils restent fermes sur les principes et exigent le retour en fonction du président N’Daw et du Premier ministre Ouane, dont la démission a été obtenue manifestement sous la contrainte. Cette position de fermeté engendrera une situation de confrontation avec l’ex-CNSP et un blocage politique à l’issue incertaine, mais elle offrira plus de chance d’enrayer durablement la mainmise préjudiciable d’un groupe de militaires sur le pouvoir au Mali. 

L’autre option est de condamner les arrestations et d’appeler au retour, dans les plus brefs délais, d’une transition civile mais sans exiger le retour en fonction du président et du premier ministre. Cela ouvre la porte à des négociations avec la junte pour réinstaller des autorités civiles. Mais, comme en août dernier, l’ex-CNSP pourrait en profiter pour mettre en place l’apparence d’une autorité civile tout en conservant la réalité du pouvoir, au risque de reproduire les mêmes effets dans un proche avenir. C’est cette option que le Conseil de sécurité des Nations unies semble suivre dans son communiqué du 26 mai. Si le reste des partenaires, et notamment la Cedeao, suivent également cette option, il faudrait cette fois assortir les négociations avec les militaires de dispositions permettant de réduire plus efficacement la part d’influence politique qu’ils conserveront afin que les autorités civiles n’en soient plus l’otage.  Dans les deux cas, l’efficacité des pressions internationales dépendra aussi de leur capacité à s’articuler à un mouvement intérieur de refus du coup de force qui pour l’instant tarde à prendre de l’ampleur.

Cette instabilité politique peut-elle peser sur le conflit avec les jihadistes ? 

Ces crises à répétition entament la crédibilité de l’Etat malien, déjà confronté aux insurrections de plusieurs groupes armés sur son territoire. Pour les populations qui vivent dans des zones en état d’insurrection, le retour ou le déploiement d’un État englué dans des querelles intestines à Bamako est un scénario de plus en plus improbable. Cela donne de l’espace aux jihadistes et à d’autres groupes armés qui se présentent de fait comme des alternatives durables à l’autorités d’un Etat absent. Par ailleurs, on ne peut écarter non plus que cette nouvelle crise entame la confiance déjà très fragile dans l’accord de paix inter-malien, signé en 2015 mais dont les principales dispositions en matière de sécurité et de décentralisation n’ont toujours pas été mises en place. Si on félicitait il y a quelques mois les autorités de transition pour avoir développé de meilleures relations que leurs prédécesseurs avec les groupes armés signataires, en particulier ceux de la Coordination des mouvements de l’Azawad, la crise actuelle à Bamako pourrait convaincre certains de ces mêmes signataires que rester dans le giron d’un Etat malade et incapable d’honorer ses engagements n’est pas la meilleure solution. Ces tensions pourraient d’autant plus se développer que le M5-RFP, dont un des dirigeants pourrait former le prochain gouvernement à l’appel des militaires de l’ex-CNSP, intègre des personnalités connues pour leur hostilité à l’accord de paix de 2015.


Cet article est republié à partir de crisisgroup.org. Lire l’original ici.