Répression des manifestations en Guinée: les titres de la presse internationale


Répression des manifestations contre le projet de nouvelle Constitution en Guinée : la presse internationale en parle


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La perversion de la transition de décembre 2008 sous Dadis Camara


Politique

C’était hier 2008-2010.

Nous republions un extrait de l’article de Dominique Bangoura intitulé : Le coup d’État de décembre 2008 et la Transition controversée en Guinée, publié dans la revue Cairn en 2015. Ce rappel de l’histoire récente de la Guinée est important dans un contexte d’amnésie collective où les événements d’aujourd’hui ont tendance à enterrer ceux d’hier.


Extrait

À son arrivée au pouvoir, Moussa Dadis Camara (MDC) a pris des
engagements et a promis à l’opinion nationale et internationale qu’il
organiserait des élections et ne serait pas candidat. Le samedi 27 décembre
2008, devant une salle comble du Camp Alpha Yaya Diallo, MDC a rencontré tous
les acteurs (partis politiques, société civile, syndicats etc.) et leur a
expliqué ses intentions. À cette occasion, il a précisé : « Je ne me
présenterai pas à une élection ».

MDC a pris les mêmes engagements devant le Groupe
International de Contact pour la Guinée (GIC-G) créé à l’initiative de la
Commission de l’Union africaine et dont la première réunion a eu lieu le 16
février 2009 à Conakry. Cependant, au fil des mois, le capitaine Moussa Dadis
Camara a montré son incapacité à honorer ses engagements.

Les premiers signes de rupture

Les premiers éléments troublants proviennent des discours
de Moussa Dadis Camara, notamment le Discours-programme du 14 janvier
2009 qui s’apparente à un programme d’un chef d’État élu, en début de mandat.

Le second indice qui sème le doute dans les esprits est
le Discours de Boulbinet du 15 avril 2009. À cette date, MDC s’en
prend sans raison justifiée aux partis politiques et menace d’« enlever la
tenue » pour se porter candidat s’ils ne le ménagent pas. Ce discours-test
a pour objet de mesurer jusqu’où il peut aller. Il fait l’effet d’une bombe
tant les désapprobations fusent de toutes parts. À tel point que MDC se ravise
et se réengage à ne pas se présenter à travers les déclarations de la
délégation du CNDD reçue à Bruxelles à l’Union européenne le 29 avril. Dans ce
prolongement, il réitère ses engagements auprès du GIC-G lors de la troisième
session du Groupe tenue à Conakry les 5 et 6 mai 2009.

Les autres motifs d’inquiétude reposent sur la multiplication des mouvements de soutien à Moussa Dadis Camara. Les délégations se succèdent au camp Alpha Yaya pour aller le féliciter ou l’encourager. Chefs coutumiers et religieux, notables, parents, ressortissants de sa région natale et d’autres régions de la Guinée, hommes en uniforme, ils sont nombreux à venir faire la cour au chef de la junte. Il est difficile, dans ces conditions, de déceler la part de sincérité et de calcul, mais toujours est-il que ces comportements de séduction troublent et biaisent le jeu politique de la transition. Des formes d’allégeance politique se mettent rapidement en place avec les meetings organisés par le gouverneur de Conakry, manipulant une faction de jeunes et de femmes. En outre, un Bloc des Forces Patriotiques est créé, comprenant d’anciennes forces conservatrices et de nouveaux groupuscules se ralliant au pouvoir. Enfin, un facteur de crainte, et non le moindre, apparaît avec les volte-face intempestifs du chef de la junte, ses signaux contradictoires, ses colères à l’emporte-pièce en public. Le coup de grâce porté à la transition en Guinée est finalement donné en présence du GIC-G lors de sa sixième session les 3 et 4 septembre 2009 à Conakry. À cette date, revenant à la charge et faisant voler en éclats tout espoir d’apaisement, Moussa Dadis Camara rompt son serment. En aparté, il glisse aux diplomates présents : « Je vais me présenter parce que tout le peuple me le demande. Si je ne le fais pas, je risque de perdre la confiance du peuple ».

La concentration des pouvoirs entre les mains du capitaine

MDC accapare le pouvoir exécutif entre ses mains. Il gouverne par décrets et ordonnances. Le pouvoir judiciaire est délaissé. Les cours et tribunaux fonctionnent au ralenti par manque de moyens humains et matériels.

Le ministre de la Justice est un militaire, ce qui représente une violation du principe d’indépendance du droit. Les magistrats ont fait grève en juin 2009 pour dénoncer les dérives du régime ainsi que la création d’un Secrétariat d’État chargé des conflits, une structure parallèle qui applique non pas le droit mais les prescriptions dictées par la junte. En outre, Moussa Dadis Camara adopte une posture de procureur dans la lutte très médiatisée et sélective contre la corruption et les narcotrafiquants. Sur ce point, si la lutte est justifiée sur le fond, en revanche, la méthode utilisée est contestable. Tous les présumés coupables ne sont pas recherchés avec la même rigueur et toutes les garanties en matière de présomption d’innocence ne sont pas remplies. En septembre 2009, un collectif d’avocats dénonce les pratiques en cours et les mauvais traitements infligés aux détenus. Le pouvoir législatif n’existe pas. L’Assemblée nationale a été dissoute au moment de l’arrivée de la junte au pouvoir. Certes, il y a un projet de création d’un organe législatif provisoire appelé Conseil national de transition (CNT), mais bien des interrogations et doutes subsistent sur son mandat, sa composition, sa durée, son indépendance vis-à-vis du CNDD, qui dispose lui-aussi de compétences similaires.

L’absence de restauration du cadre constitutionnel

Une constitution, des lois organiques et un code
électoral sont nécessaires pour organiser les élections. Or, fin septembre
2009, dix mois après le coup d’État et quatre mois avant l’élection
présidentielle prévue pour fin janvier 2010, rien n’a encore été fait dans ce
sens, alors que le chronogramme de Moussa Dadis Camara, présenté au
Palais du Peuple à Conakry le 16 février 2009 devant le Groupe international de
contact pour la Guinée (GICG), prévoyait quatre étapes, avec notamment la mise
en place des « organes », du « cadre » et des
« instruments de la Transition ».

La transition subit des blocages importants :
mi-septembre 2009, il n’y a toujours pas de Premier ministre de transition, de
gouvernement de transition, de Parlement de transition ou de Conseil national
de transition (CNT). De plus, le pays n’est toujours pas doté de constitution.
Il conviendrait de réviser la Constitution de 1990 qui posait les principes
d’un État de droit démocratique et prévoyait la limitation du pouvoir (durée du
mandat présidentiel à 5 ans ; nombre de mandats limité à deux, le premier
étant renouvelable une seule fois ; un âge des candidats fixé à quarante
ans minimum et soixante-dix ans maximum) en réaménageant quelques articles,
dans un souci d’inclusion. La révision de la Constitution devrait se faire par
un Conseil National de Transition (CNT) compétent, ayant vocation législative
et siégeant en tant que Parlement de la transition. L’adoption de la
Constitution devrait se faire soit par référendum soit par vote des membres du
CNT à la majorité qualifiée (les deux tiers des députés selon l’article 91 de
la Constitution). Toutefois, rien de tel n’est engagé.

Populisme et insécurité

L’action de Moussa Dadis Camara s’apparente à du populisme.

Il prend le peuple à témoin, l’interpelle pour telle ou telle nomination, révoque sur le champ collaborateurs, cadres et ministres en public. Il insulte son Premier ministre et les images passent en boucle à la télévision d’État. Cette pratique montre son aversion pour l’administration, pour l’exercice de la politique par les gouvernants. Cela s’explique par son absence d’expérience politique et son incompétence à gouverner. D’ailleurs, s’il a choisi de mettre l’accent sur la lutte contre la corruption et les narcotrafiquants, c’est parce que c’est un domaine qu’il connaît pour l’avoir côtoyé. Il tient également par ce biais à mettre ses protégés à l’abri. Cette façon de se mettre en scène est populaire, et cela plait au peuple qui croit qu’enfin les choses changent. Mais en réalité, les conditions de vie et de travail restent aussi difficiles qu’auparavant, et en quelques mois, c’est au tour de la junte de se prendre elle-même au jeu de la corruption.

Par ailleurs, le comportement des forces de défense et de
sécurité dans les quartiers, en ville et à l’intérieur du pays est très
préoccupant. Les exactions à l’encontre des populations civiles et des hommes
d’affaires se sont intensifiées en 2009. L’insécurité est partout. Un rapport
de l’ONG Human Rights Watch intitulé « Guinée : Le gouvernement doit
discipliner ses soldats. Vols à main armée, extorsions et intimidations sous le
nouveau gouvernement » fait état du récit de victimes et de témoins
d’incidents commis par des soldats lourdement armés portant des bérets rouges
et se déplaçant dans des véhicules tant civils que militaires.

Malgré les appels répétés des organisations de défense
des droits de l’Homme, la Commission nationale d’enquête sur les massacres de
2006 et de 2007 (dont la loi portant création avait été votée en mai 2007)
n’est toujours pas effective. Moussa Dadis Camara avait pourtant promis, pour
l’étape n°4 de son Chronogramme, « la mise en place d’une
Commission Vérité, Justice, Réconciliation, la poursuite de l’enquête sur les
événements de juin 2006, janvier et février 2007 » (répression meurtrière
de manifestations). Mais rien n’est entrepris dans ce sens.

En conclusion, le constat ne souffre d’aucune ambiguïté.
Le régime de Moussa Dadis Camara viole le principe démocratique de séparation
des pouvoirs ; il n’engage aucune action pour la restauration du cadre
constitutionnel ; il ne respecte ni les droits de l’Homme ni les libertés
publiques, en particulier celle des médias ; il entrave le fonctionnement
des partis politiques, des organisations de la société civile et des syndicats.
Il menace les dirigeants civils et politiques.

Le spectre de la candidature du capitaine Camara à l’élection
présidentielle

Depuis l’indépendance en 1958, la Guinée n’a connu aucune
élection libre, crédible et transparente du fait des régimes politiques
successifs qui s’y sont violemment opposés. Par conséquent, le pays a besoin
d’un profond renouveau politique et les Guinéens ont massivement montré qu’ils
voulaient ce changement lors des grèves, manifestations et émeutes de
2006-2007. Or, le changement n’est pas possible sous Moussa Dadis Camara. Le
véritable changement ne peut venir que par une alternance au pouvoir et
l’avènement d’un régime démocratique. L’alternance signifie l’élection d’un
nouveau dirigeant sur la base de son projet de société, de son programme de
gouvernement, de son intégrité morale, de son sens des responsabilités, de ses
compétences avérées pour mettre en œuvre un projet de refondation. Cependant,
une alternance démocratique n’est possible que si les conditions d’un scrutin
libre, ouvert et juste sont réunies.

Le scénario d’une alternance démocratique permettant le
retour à un régime civil et légitime ne peut survenir que si deux défis sont
relevés : la volonté politique du chef du CNDD d’aller dans ce sens et
l’indépendance ainsi que le fonctionnement régulier de la Commission électorale
nationale indépendante (CENI). Or, le constat est clair : le président du
CNDD n’a pas la volonté politique d’organiser une élection présidentielle juste
et honnête pour le début de l’année 2010. De plus, il y a un risque de
manipulation de la CENI étant donné son statut et sa composition.

En réalité, ces deux obstacles à une alternance
démocratique ne peuvent être surmontés que par une union sacrée des Forces
vives. Pour la première fois en Guinée, les Forces vives, qui sont composées
des partis politiques, des dirigeants syndicaux et des organisations de la
société civile, se concertent et prennent des positions communes pour la
gestion de la transition. C’est ainsi que d’un commun accord, elles décident de
l’organisation d’un grand meeting pacifique le 28 septembre 2009, ayant pour
objectif de montrer leur capacité de mobilisation face à la junte d’une part,
et de protester contre l’éventuelle candidature du capitaine Moussa Dadis
Camara à la prochaine présidentielle d’autre part.

Le choix de tenir un meeting pacifique au Stade du 28
septembre est à la fois symbolique et sécuritaire : la date rappelle celle
du référendum historique ayant conduit le pays à l’indépendance en 1958 ;
et surtout, les Forces vives veulent éviter une marche ou des mouvements de rue
qui pourraient amener des débordements et des dérives de la part des forces
armées et de sécurité, comme ce fut le cas en 2006-2007.

Dominique BANGOURA est diplômée de l’Institut d’Études Politiques de Strasbourg, est docteur d’État en science politique et habilitée à diriger des recherches (HDR). Après avoir été Secrétaire général de l’Institut africain d’études stratégiques (IAES) au Gabon puis avoir enseigné au Département de Science politique de la Sorbonne, elle dirige les recherches à l’Observatoire politique et stratégique de l’Afrique (OPSA) et enseigne dans les Universités de Yaoundé, Abidjan ainsi qu’à l’Université Panafricaine. Elle est l’auteur d’une dizaine d’ouvrages dont le premier Les Armées africaines (1960-1990), est un résumé de sa thèse. En tant que spécialiste de l’Afrique, elle a publié plus de quatre-vingts articles scientifiques ainsi qu’une dizaine de rapports pour des organismes nationaux, régionaux et internationaux. Elle est experte en gouvernance, stratégie, sécurité, justice et RSS et a effectué des missions dans vingt-sept pays sur le continent africain.


Le titre de cette republication est un choix de notre rédaction. L’intégralité de l’article ici





Deux phrases pour éviter le chaos [Par Lamarana Petty Diallo]


Depuis un certain temps, la situation socio-politique guinéenne est des plus préoccupantes car elle met en danger la paix sociale. Elle menace les fondements de la nation, la sécurité des citoyens, le vivre- ensemble souvent mis à mal par les systèmes politiques successifs.

A
nouveau, notre peuple est face à de grands défis et enjeux à relever pour de
nouvelles perspectives d’avenir. Il a su les relever par le passé en empruntant
la voie de l’indépendance en 1958 et de la démocratie dans les années 90.

Le
chemin à emprunter pour les atteindre serait des plus aisés si ce n’est
l’obstination d’un système, d’hommes et de femmes qui semblent être sourds aux
bruits alentours, aux voix de l’histoire et à la toute-puissance de la force du
verbe : c’est-à-dire le dialogue.

Ces
tares ont leur corollaire en mode de mauvaise gouvernance : corruption,
gabegie, laisser-aller, immoralité intellectuelle et professionnelle. Des
méthodes et pratiques de gouvernance qui semblent avoir fait leur temps car un
nouveau soleil pointe à l’horizon et commence à illuminer la Guinée.

Le mur de la peur est
tombé

Les
Guinéens ont très longtemps subi la mal-gouvernance et ses conséquences sur
l’épanouissement de la nation et la consolidation des valeurs démocratiques.

Au
fil du temps, ils ont eu l’intime conviction que les systèmes passent et les
pratiques restent. De déceptions à soubresauts, ils sont désormais en phase de
passer de la frustration à la revendication et à la révolte.  Si ce n’est à la révolution sociale tout
simplement.

Les
mouvements de contestation, sources d’inspiration du changement qui pointe en
Guinée font lésion : les printemps arabes (2010-2011) ; « La
tempête de Ouaga » (c’est de moi) ou la deuxième révolution burkinabé, qui
mit fin en 3 jours au pouvoir de Blaise Compaoré. Encore plus frais et en
cours, la « Révolution du Sourire » ou le printemps algérien (février
2019- novembre 2019).

Autant dire que la situation actuelle que connait la Guinée ne tombe pas du ciel. Le pouvoir aurait mieux fait de comprendre que le peuple ne peut plus se murer dans la peur, le silence complice et la subordination coupable. Ainsi mettrait-il fin à sa surdité, son indifférence, son arrogante et son cynisme en apportant la réponse aux maux qui rongent le pays.

Mais
les attitudes et propos de certains caciques du système qui banalisent la mort
des citoyens montrent que nous en sommes loin. Leur raisonnement belliqueux est
le corollaire des répressions macabres des forces de l’ordre qu’ils justifient
dans ces termes : « Si une manifestation est violente, l’État a
aussi le devoir régalien de maintenir l’ordre public ». On ne peut mieux
se montrer complice des actes criminels qui ont coûté la vie à plus d’une centaine
de citoyens.  

Ces derniers jours, ce sont les chantages et les discrédits qui ont fait surface. Des personnes, de la même trempe que la précédente, qualifient l’opposition républicaine et le FNDC de djihadistes.  Oublient-elles que nul ne les écoute plus tant elles n’inspirent pas confiance. 

Loin
de comprendre que le sens de l’histoire a pris une autre tournure, de telles
personnes se confortent dans le déni de l’imminence d’un changement de mode de
gouvernance.

La Guinée attend son printemps

Depuis 1958, la Guinée a fait de grands pas en avant. Certes, elle a été freinée dans sa marche par les maux évoqués plus haut. Cependant, nul ne peut nier la vaillance de notre peuple dans son combat pour la démocratie et l’Etat de droit.

 Un peuple qui a envoyé le Parti Démocratique de Guinée (PDG) au musée et conduit le Parti de l’Unité et du Progrès (PUP) à la morgue. L’obstination dont font preuve certains idéologues du RPG risque d’avoir les mêmes conséquences.

En
tout état cause, l’évolution ne saurait s’interrompre. Les systèmes politiques
guinéens n’ayant su s’adapter ni aux marqueurs historiques, démographiques, politiques,
sociaux ni aux nouvelles aspirations des jeunes générations doivent céder la
place.

Le
chômage des jeunes est galopant. L’école et le système scolaire sont délaissés.
Les perspectives d’avenir sont bouchées alors que l’exode interurbain (ou rural)
est des plus élevé.

Les
jeunes guinéens empruntent les routes de la mort plus que quiconque. Leur
nombre est effarant en Europe : il dépasse de loin ceux des pays
en guerre du proche et moyen orient ou d’ailleurs. A contrario, la population
guinéenne est parmi les plus jeunes.

L’opportunité
de changement découle de cette réalité. Si les tentatives ont échoué par le
passé, elles ne montrent pas moins que les Guinéens connaissent le chemin de la
démocratie. Qu’ils ont été des artisans de la lutte contre les pouvoirs
oppressifs coloniaux et post-indépendances.

Si
le FNDC n’est pas directement lié à cette généalogie historique et
politique de
combat pour la défense des droits et devoirs, il n’en est pas moins un
élément du chaînon. Il est une nouvelle étape de la lutte pour
l’émancipation. En tant que
tel, il peut être exposé aux risques d’échec. Je ne reviendrai pas
là-dessus
(voir mon article : « Troisième mandat, la messe serait-elle dite » ?
in Le Populaire, n°698, 23/12/2019).

Si
ce n’est pas la première fois que nous vivons une coalition entre force
politique, civile et/ou syndicale, les revendications actuelles semblent annoncer
la fin d’un cycle. En effet, depuis
les premières mobilisations d’octobre 2019, les Guinéens bravent la pluie, la poussière,
la faim, la soif et les misères quotidiennes en quête de la réponse à la
question qu’ils se posent : le président Alpha Condé veut-il un troisième
mandat ? L’annonce du 31 décembre a levé un coin du voile. Depuis, la
liste de morts ne fait que s’alourdir. Pourtant, à défaut d’être évité, on peut
y mettre fin.

Deux
phrases, deux simples phrases peuvent suffire

Monsieur
Alpha Condé peut éviter le pire à la Guinée s’il est resté celui qu’il était dans les années 70. Celui qui
faisait le tour des universités françaises pour convaincre les étudiants
africains de lutter contre les pouvoirs à vie et les dictatures. 

S’il
est resté le même homme qui combattit pour le panafricanisme, il donnera
l’exemple aux générations africaines, actuelles et futures.

Mais, bon nombre d’analystes pensent que l’homme n’a pas seulement changé. Il s’est métamorphosé, estiment-ils. Au cas contraire, il n’aurait jamais tenté d’imposer une nouvelle constitution, premier pas vers un troisième mandat, aux Guinéens.

Ceux
qui ont connu M. Alpha Condé sont persuadés que le président guinéen a changé de
cap et de vision en se lançant dans une perspective qui pourrait faire basculer
son pays dans un conflit aux conséquences imprévisibles. En dépit de tout, ils
sont encore nombreux à croire qu’il peut encore rattraper la balle au bond.

Pour
cela, il a une seule chose à faire. Un seul acte qui effacerait tous les
ratages, toutes les déceptions et lui donnerait l’image de l’homme auquel
il s’est toujours identifié en se qualifiant « le Mandela de la Guinée ».

Dès lors, il rentrerait dans l’histoire au
sens noble du terme. Il ouvrirait une nouvelle page de l’histoire guinéenne et
au-delà dans laquelle s’identifieront ses contemporains et les générations
futures. Il n’a qu’un pas à franchir avec des mots simples et salvateurs :

« Je
renonce au changement de constitution ».

« Je
ne suis pas candidat à un troisième mandat ».

Ces
deux phrases vaudront toutes les phrases célèbres de l’histoire. Les Guinéens échapperont
alors à la dimension dramatique qui se joue
actuellement pour lui donner une tournure humaine et fraternelle. Ainsi, notre
pays aurait pallié au pire.

Tendons
les oreilles d’ici-là pour accueillir l’Aube nouvelle.


Par M. Lamarana Petty Diallo , Guinéen- Professeur Hors-Classe, lettres-histoire, Orléans- France




L’opposition boycotte les élections législatives du 16 février 2020 en Guinée


Au lendemain d’une nouvelle forte mobilisation contre l’hypothèse d’un troisième mandat du président Alpha Condé, les principaux partis d’opposition en Guinée confirment leur boycott du prochain scrutin législatif de février 2020.

Réunies sous la bannière du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC),
grandes formations de l’opposition et organisations de la société
civile ont renoncé à déposer des listes de candidats en vue des
législatives du 16 février 2020. La Commission électorale
nationale indépendante (CENI) a enregistré le dépôt de listes émanant de
29 partis, dont le Rassemblement pour le peuple de Guinée (RPG) du chef
de l’Etat, a indiqué, le 7 janvier lors d’une conférence de presse, le
président de cette institution, Amadou Salif Kébé. Aucune liste n’émane
de l’opposition.

Depuis plusieurs mois, le FNDC mène le combat contre un éventuel troisième mandat du président Alpha Condé, né en 1938, qui achève fin 2020 son deuxième et, en principe dernier, quinquennat.

“Ces élections, on les empêchera”

Nous confirmons le boycott. Les conditions pour une élection transparente ne sont pas réunies”, a déclaré à l’AFP le principal opposant guinéen, Cellou Dalein Diallo. Il a réclamé, pour changer de position, “un fichier électoral assaini, un recensement correct (des électeurs) et un président de la Commission électorale moins partisan“. “Ces élections, on les empêchera“,
a ajouté M. Diallo, conforté dans ce projet par un autre leader de
l’opposition, l’ex-Premier ministre Sidya Touré, sollicité par l’AFP. Ce
scrutin, contre lequel se dresse l’opposition guinéenne depuis le 23
décembre 2019, a déjà été reporté à plusieurs reprises.

Les
législatives en Guinée associent deux modes de scrutin. Vingt-neuf
partis vont concourir pour remporter 76 des 114 sièges de l’Assemblée
nationale mis en jeu sur des listes nationales, qui seront répartis à la
proportionnelle. Les sièges restants seront désignés lors de scrutins
majoritaires à un tour dans les 38 circonscriptions du pays (33 en
province et cinq à Conakry). Quatorze partis ont inscrit des candidats
pour ce scrutin majoritaire, selon la CENI.

Un coup monté d’Alpha Condé, selon l’opposition

Nous
sommes déterminés à organiser les législatives à la date prévue du 16
février 2020, puisque nous sommes techniquement et matériellement prêts
“, a affirmé son président M. Kébé. Ces élections visent à renouveler l’Assemblée nationale, dominée par le RPG.

Aux yeux de l’opposition, il s’agit purement et simplement d’une manœuvre du président Condé pour renforcer son pouvoir, alors qu’il a l’intention de faire adopter, par référendum, une modification de la Constitution lui permettant de briguer un troisième mandat en octobre 2020. Après des années de dictature dans ce petit pays de 13 millions d’habitants d’Afrique de l’Ouest, pauvre malgré d’importantes ressources minières, Alpha Condé a été le premier président démocratiquement élu en 2010. Mais, à l’instar de nombre de ses homologues d’Afrique ou d’ailleurs dans le monde, il semble aujourd’hui plus attaché au pouvoir qu’à sa remise en jeu, l’un des principes mêmes de la démocratie.


Cet article est republié à partir de francetvinfo.fr. Lire l’original ici





Le FNDC « interpelle les Forces de défense et de sécurité à assumer pleinement leur rôle républicain » [Déclaration]


Engagé à intensifier les manifestations à partir du 13 janvier 2020 pour exiger l’abandon du projet de nouvelle constitution dont le seul objectif est de permettre à Alpha Condé de se représenter pour un 3e mandat, le FNDC « exhorte les Forces de défense et de sécurité à la retenue, à renoncer à toute forme de violences et à respecter le droit des citoyens à manifester contre le coup d’État civil à partir du lundi 13 janvier 2020 ».


DÉCLARATION

L’imminence d’un coup d’État civil a été officiellement annoncé par le Président Alpha Condé le 19 décembre 2019. En conséquence, le FNDC interpelle les Forces de défense et de sécurité à assumer pleinement leur rôle républicain, à tirer les leçons du passé et à refuser d’être un instrument de répression sanglante contre son peuple.

Est-il nécessaire de rappeler le contexte et le rôle fondamental qu’a joué
l’armée guinéenne dans l’instauration de la démocratie et de l’État de droit
par le transfert du pouvoir aux civils conformément à la « Déclaration
conjointe de Ouagadougou » le 15 janvier 2010 ?

Tous les sacrifices humains et matériels qui ont été consentis durant cette
période sombre ne sont-ils pas suffisants pour garantir l’alternance
démocratique en Guinée?

En dépit des réformes engagées en son sein, les forces de défense et de
sécurité sont-elles prêtes à ternir davantage leur image de sang et à être la
risée des autres armées républicaines de la sous-région en obéissant
aveuglément aux ordres manifestement illégaux d’un pouvoir civil qui est, en
partie, le fruit de leur renoncement?

Depuis le 14 octobre 2019, le peuple de Guinée démontre de façon résolue et
pacifique son opposition catégorique au coup d’État constitutionnel à travers
de gigantesques manifestations sans précédents.

La communauté internationale et, plus particulièrement, celle ouest africaine
s’est clairement désolidarisées du projet illégal et inopportun de changement
de constitution pour un 3eme mandat en faveur de M. Alpha Condé.

En dépit des protestations populaires, de toutes les mises en garde
officielles et officieuses, M Alpha Condé et son clan d’arrivistes se
radicalisent davantage et se montrent plus sourds que jamais. Comme
conséquences de leur obstination, on dénombre à ce jour des centaines
d’arrestations, des centaines de blessés et 26 jeunes (âgé de 14 ans à 32 ans)
tous impunément tués par balles. Il est inacceptable que tant de crimes
ignobles soient commis en vue d’imposer un pouvoir à vie au profit d’un
vieillard de plus 82 ans qui pense que son âge, sa fonction et le temps seront
une excuse ou un échappatoire.

Les Forces de défense et de sécurité comprendront-elles que l’on veut leur
charger de tirer les marrons du feu?

Il est certain que M Alpha Condé est déterminé à exécuter toutes les menaces
qu’il a lui-même proférées contre son propre peuple. Pire, le régime s’active
actuellement à planifier des affrontements ethniques dans plusieurs régions du
pays en vue de créer le chaos qui servirait de prétexte à leur projet
machiavélique.

Le FNDC dénonce ce cynisme, alerte la communauté internationale et invite
les populations à s’opposer farouchement à la division qui est devenue l’ultime
stratégie de ce clan de pilleurs et d’arrivistes.

Nous rappelons que l’armée est une institution de la République. A ce titre,
la sauvegarde de l’unité nationale, la lutte pour le respect de la Constitution
et de l’alternance démocratique sont un devoir sacré qui s’imposent à
l’ensemble des forces de défense et de sécurité au même titre que les
institutions civiles de la République.

Le FNDC exhorte les Forces de défense et de sécurité à la retenue, à
renoncer à toute forme de violences et à respecter le droit des citoyens à
manifester contre le coup d’État civil à partir du lundi 13 janvier 2020.

Vive la République !

Vive la Guinée !

Pas de Référendum ! Pas de 3ème Mandat !

Pas de Coup d’État Constitutionnel !

Vive l’alternance démocratique dans un climat apaisé!

Ensemble unis et solidaires, nous vaincrons!
Conakry, le 11 janvier 2020.





Débat Constitutionnel: Pour le juriste Mohamed Camara, « l’Avis de la Cour Constitutionnelle a porté sur la ‘’régularité’’ au détriment de la conformité»


Sur sa page Facebook, le juriste Mohamed Camara, ancien chef de cabinet du ministère des Affaires étrangères et des guinéens de l’étranger, débarqué de ses fonctions le 27 novembre dernier, livre son analyse sur le débat autour du projet de nouvelle constitution dans le pays.


Analyse sur la crise née du débat constitutionnel en Guinée et approches de solutions

Face à la persistance des crises en Guinée (électorale, sociale, constitutionnelle,…), il est opportun de faire des propositions de solutions.

Avant l’annonce officielle faite par le Président de la République sur la volonté d’aller au référendum constitutionnel, le débat était sans objet, par précaution d’avoir des preuves juridiquement administrables, pour éviter la spéculation et son corollaire d’argutie juridique.

Après l’annonce officielle faite à ce sujet le 19 décembre 2019, au-delà des avis des doctrinaires, le débat juridique devait être tranché en dernière instance par la Cour constitutionnelle en application combinée des articles 80 et suivants de la Constitution du 7 mai 2010 et en vertu de la loi organique L/2011/06/CNT du 10 mars 2011 portant création, organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle.

Le sujet est maintenant à débat à la suite logique de l’invitation officielle faite par le Son Excellence Monsieur le Président de la République, aux citoyens de s’approprier le contenu dudit projet.

Ce projet de Constitution avec l’Avis N°002/2019/CC du 19 décembre 2019 de la Cour Constitutionnelle, m’inspire une analyse aux plans de la forme et du fond, sur le fondement de l’article 739 alinéa 2 de la Loi N° 2016/059/AN du 26 octobre 2016 portant Code pénal qui admet les commentaires techniques.

Sur la forme

D’entrée, la Cour Constitutionnelle a eu le mérite d’avoir montré très clairement dans son Avis que le référendum législatif prévu à l’article 51 est totalement différent du référendum constitutionnel, objet de la demande d’avis de conformité du Président de la République.
En clair, la simple lecture désintéressée de l’article 51 de la Constitution en vigueur, permet de savoir très clairement que cette disposition ne traite pas du référendum constitutionnel et est de ce fait, inopérante en l’espèce.

Mais, en matière de procédure, il aurait été salutaire que la Cour Constitutionnelle indique dans son appréciation au préalable, les conditions en temps normal ou anormal, nécessitant l’adoption d’une nouvelle Constitution. Autrement dit, s’il y a ou non un vide constitutionnel occasionné par la suite d’évènements importants (accession à l’indépendance, création d’un Etat, construction d’un Etat fédéral, fusion d’Etats,…) ou d’évènements exceptionnels (révolution, coup d’Etat, guerre, occupation, crise institutionnelle majeure et aigüe,…) pour justifier la nécessité d’adopter ou non, une nouvelle Constitution.

Malheureusement, la Cour Constitutionnelle ne l’a pas fait. Elle est passée outre en donnant son Avis favorable sur la régularité de l’initiative alors qu’elle a été saisie pour avoir son Avis de conformité à la Constitution en vigueur. D’où sa difficulté à trouver une solution juridique.

A rappeler qu’au plan procédural, il y a lieu de souligner que les populations n’ont pas été informées par un acte officiel de la mise en place ni d’un constituant au plus, ni de la Commission technique au moins, avant la rédaction et la diffusion dudit projet pour des fins de transparence et d’ouverture aux contributions citoyennes pouvant l’enrichir à l’instar de l’appréciable approche participative faite par le Conseil National de la Transition (CNT) en 2010.

C’est autant dire qu’il aurait fallu présenter ledit projet en Conseil des Ministres étant donné que la Commission technique aurait travaillé sous la conduite du Ministre de la Justice, Garde des Sceaux.
Car, même une simple codification à droit constant qui obéit à une procédure impliquant l’exécutif de bout en bout, ne pouvait y déroger de la sorte.

Mais paradoxalement, si la Cour Constitutionnelle a écarté et à bon droit, l’article 51 de la Constitution, elle s’est axée sur le même article en partie, pour motiver la recevabilité de la demande d’avis du Président de la République. La Cour Constitutionnelle, à la recherche d’une source constitutionnelle introuvable, a élargi son raisonnement aux formulations du genre, (Conformément à l’esprit général de la Constitution et les principes généraux du droit) sans donner la moindre précision sur leur contenu, ni sur leur portée, encore moins sur leur champ d’application.

Aussi, la Cour Constitutionnelle a invoqué l’article 51 de la Constitution quoiqu’inopérant en intervertissant les termes liés à la « régularité » qui se rapporte aux opérations du référendum et la « conformité » qui concerne le projet ou la proposition par rapport à la Constitution. Le juge constitutionnel sait très bien que veiller sur la régularité des opérations du référendum législatif est différent de l’émission de son avis sur la conformité à la Constitution. Cette inversion de termes est peut-être due au fait que l’article 51 de la Constitution en vigueur, écarte de son champ d’application, l’idée de contrôle de conformité d’une nouvelle Constitution à celle existante qui n’est ni suspendue, ni détruite, tant la Cour était dans le besoin de motiver son Avis favorable par un fondement juridique.

Ainsi, l’Avis de la Cour Constitutionnelle a porté sur la ‘’régularité’’ au détriment de la conformité. Or, elle a été saisie pour avoir son Avis de conformité et non son Avis de régularité. A préciser qu’à l’article 51 de la Constitution, la régularité se rapporte aux opérations du référendum qui n’ont pas encore débuté, alors que l’Avis de conformité est liée à l’examen du projet de loi par rapport à la Constitution en vigueur et non d’un projet de nouvelle Constitution par rapport à une Constitution en vigueur (qui ne se fait pas en droit constitutionnel).

La demande d’avis qui a été soumise ne portait pas sur une régularité des opérations du référendum, mais plutôt sur l’Avis de conformité du projet législatif à la Constitution (article 51 alinéa 3).
Il s’y ajoute que l’article 51 de la Constitution ne traite pas de la régularité d’initiative de référendum constitutionnel en son alinéa 3, mais plutôt, de régularité des opérations de référendum législatif (dans leur déroulement).
Elle dit s’être prononcée sur la régularité de l’initiative du référendum sans décrire la procédure.

En bref, le fait de n’avoir pas examiné le contenu du projet joint, la Cour Constitutionnelle a privé les autorités et les populations de son expertise en la matière, étant donné que sa jurisprudence s’impose à tous.

Sur le fond

La Cour Constitutionnelle a mentionné clairement au Considérant n°2 de son Avis N°002/2019/CC du 19 décembre 2019 qu’elle n’a pas porté son appréciation sur le contenu du projet de Constitution joint qui constitue pourtant, la substance référendaire.
Elle dit avoir porté « son appréciation sur la régularité de l’initiative du référendum constitutionnel et non sur le contenu de projet de Constitution».

Pourquoi elle dit n’avoir examiné le projet joint.
Pourtant, quatre (4) sur les six (6) Considérants mentionnés dans son Avis, portent sur ledit projet, objet de la saisine. Elle sait aussi que « l’accessoire suit le principal en droit ».

La Cour Constitutionnelle invoque ensuite sélectivement l’article 2 alinéa 1 de la Constitution en évitant soigneusement l’alinéa 7 du même article 2 qui dispose que « Toute loi, tout texte réglementaire et acte administratif contraires à ses dispositions sont nuls et de nul effet ».

De plus, en invoquant l’article 21 alinéa 1 de la Constitution qui dispose que « Le peuple de Guinée détermine librement et souverainement ses Institutions et l’organisation économique et sociale de la Nation », la Cour Constitutionnelle aurait pu être complète en expliquant aux autorités et aux populations que la souveraineté pour aussi libre qu’elle soit, son exercice demeure encadré par la Constitution en application de l’article 2 alinéa 6 de la Constitution qui la balise en ces termes : « La souveraineté s’exerce conformément à la présente Constitution qui est la Loi suprême de l’Etat ». Elle encadre aussi le suffrage en le rendant « universel, direct, égal et secret » à l’article 2, alinéa 3. Puis, l’article 22, alinéa 1 de la Constitution en vigueur pose l’exigence selon laquelle « Chaque citoyen a le devoir de se conformer à la Constitution, aux lois et aux règlements ». Le vote est tout aussi encadré par la loi en vigueur.

La Cour Constitutionnelle étant gardienne de la Constitution conformément à l’article 1er de la loi organique L/2011/06/CNT du 10 mars 2011 portant création, organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle, elle ne devait pas se limiter à la recevabilité de la demande d’avis sans examiner le document joint pour les besoins de la cause. Car, en donnant son avis favorable, parce que redoutant le reproche de déni de justice en matière de recevabilité, elle n’est pas exempte de reproche de déni de justice ou de refus d’assumer une responsabilité constitutionnelle pour n’avoir pas porté son appréciation sur le contenu d’un projet censé être la loi suprême du pays et devant déterminer la vie de la nation au sens de l’article 2 alinéa 6 de la Constitution du 7 mai 2010.

Or, en application de l’article 14 du Décret D/98/N° 100/PRG/SGG du 16 juin 1998 portant Code de procédure civile, économique et administrative, « Le juge doit examiner tous les chefs de demande qui lui sont soumis. Il est tenu de statuer sur tout ce qui lui est demandé et seulement sur ce qui lui est demandé ».

C’est autant dire que le juge ne doit statuer ni infra petita ni ultra petita. C’est-à-dire, en statuant, le juge ne doit aller ni en deçà, ni au-delà de ce qui lui est demandé.

La Cour Constitutionnelle a-t-elle voulu se protéger contre la critique de vouloir défendre sa propre cause sur le point concernant le mode de désignation nominative de son Président par l’Exécutif qui remplacerait le mode de désignation élective à l’article 111 du projet joint ?
La Cour constitutionnelle voit-elle là une source certaine d’affaiblissement accru de son indépendance à l’article indiqué ci-dessus dudit projet ?

La Cour Constitutionnelle a peut-être voulu éviter d’indisposer les rédacteurs (méconnus des populations) du projet de Constitution tant il est vrai que ce document au-delà du problème de sa légalité, est plein de problèmes juridiques, syntaxiques, sémantiques, orthographiques,…. A titre d’exemples, les rédacteurs ont mis à l’article 21 dudit projet que « L’État a le devoir de promouvoir les épidémies et les fléaux sociaux… ». Peut-être que les rédacteurs du projet ont voulu écrire prévenir. Puis, à l’article 16 dudit projet, il est écrit : « Toute citoyen personne ». Assez de fautes et de lapsus calami qui sont révélateurs de sa rédaction inexperte, incomparable de loin au jargon juridique haut de gamme utilisé à bien des égards, par les rédacteurs de la Constitution du 7 mai 2010.

La Cour Constitutionnelle a-t-elle évité d’y mettre à découvert, les problèmes en techniques rédactionnelles (légistique), d’impertinence, d’incomplétudes en système de renvoi aux lois organiques ou d’omissions ?
Le cas de la Haute Autorité de la Communication en est une illustration. Ils n’ont pas prévu d’âge minimum pour les candidats à l’élection présidentielle, alors qu’ils ont diminué l’âge des candidats (primo votants et primo éligibles) aux législatives de 25 à 18 ans pour examiner et adopter les textes de lois de la République. Il est bon de promouvoir la jeunesse. Mais, il y a une nette différence entre la majorité pénale et la maturité d’esprit pour l’examen et l’adoption des lois de la République ou même, de la consolidation législative.

Dans le but d’accroître la plus-value de sa jurisprudence, la Cour Constitutionnelle gagnerait à privilégier les sources constitutionnelles et légales pour motiver ses décisions en lieu et place des formulations du genre : ‘’Selon l’esprit général de la Constitution’’, sans en préciser leur contenu, ni leur source de rattachement.

Les prémices de cette tendance remontent à son Arrêt AC N° AE 05 du 31 octobre 2015 relatif à la proclamation des résultats des élections présidentielles de 2015. Lorsqu’il a été reproché au Président de la CENI d’avoir prorogé les heures de fermeture des bureaux de vote, au lieu de s’en tenir aux fondements constitutionnels et légaux, la Cour Constitutionnelle a sans la moindre exception, a dit que : « qui peut le plus peut le moins », pour vider le contentieux, (Arrêt AC N° AE 05 cité ci-dessus, page 8 sur 17).

Si l’Avis de la Cour Constitutionnel découlait d’une jonction avec l’examen du contenu du projet joint, il pouvait être un référentiel pour toutes et tous. Il allait aussi servir d’outils d’aide à la décision permettant aux autorités de reconsidérer leur choix en réorientant leur volonté de réformes textuelles vers une simple révision. Car, l’adoption de l’essentiel des points contenus dans ce projet pourrait se faire au moyen d’une simple révision pour corriger en tant que de besoin, les faiblesses de la Constitution adoptée le 19 avril 2010 par vote des 159 membres du Conseil National de Transition (CNT) et promulguée par Décret D/068/PRG/CNDD/SGPRG/2010 du 7 mai 2010, au lieu de procéder à un changement constitutionnel.

Aussi, la Cour Constitutionnelle pouvait dire à l’Exécutif que la procédure a été inversée tout en indiquant celle appropriée en jurisprudence constante. Si elle examinait le projet joint avant de donner son Avis, la Cour Constitutionnelle aurait évité de laisser, advienne que pourra, le soin incertain aux électeurs de recourir à leurs propres connaissances constitutionnelles et quelques fois inexpertes, face à la forte probabilité de vices juridiques cachés qui pourraient difficilement être réglés à l’avenir par elle-même.

En clair, cet Avis de la Cour Constitutionnelle est un mauvais précédent qui pourrait favoriser la déconsolidation des acquis garantis par l’effet cliquet face à tout(e) futur(e) Président(e) de la République.

Étant émis par la gardienne habilitée de la Constitution, cet Avis est doublement insuffisant en ce sens qu’ il ne sert pas de référentiel pour l’intérêt supérieur du pays et n’offre pas de garantie à même de rassurer les populations sur le contenu du projet joint qui, au-delà du problème de sa légalité, a un souci de rédaction et est moins riche en valeur ajoutée pour justifier un changement constitutionnel.

Au regard des positions extrêmement tranchées, je sollicite humblement auprès des sages réputés pour leur neutralité et leur attachement aux valeurs (sous la conduite du 1er Imam Eh Hadj Mamadou Saliou CAMARA et de Monseigneur Vincent KOULIBALY) avec l’appui des partenaires étrangers, leur intermédiation auprès des parties prenantes pour une sortie de crise concertée, dans l’intérêt supérieur et paisible du pays, sous l’autorité de Son Excellence Monsieur le Président de la République.

Je le souhaite dans la suite logique de la dernière phrase du discours de Son Excellence Président de la République du 19 décembre 2019, lorsqu’il disait en ces termes : «Je vous invite, chers compatriotes, à placer au-dessus de toutes autres préoccupations et considérations, les intérêts supérieurs du peuple et la sauvegarde de notre nation ».

Cette intermédiation contribuera à détendre ce climat délétère, consolider la concorde sociale et l’unité nationale qui constituent prioritairement, les intérêts supérieurs d’un peuple voulant vivre dans un havre de paix, avec ses précieuses potentialités pour amorcer son développement.

Aussi, en raison de la gravité de la crise politique cyclique guinéenne à dominante électorale superposée, mal faite, inachevée ou non tenue à date échue, les parties prenantes doivent surseoir à toutes formes de manifestations en privilégiant les voies de recours légales dès qu’elles satisfont aux quatre (4) conditions nécessaires pour pouvoir intenter une action. C’est-à-dire : le droit ; l’intérêt, qu’il soit pécuniaire ou moral ; la qualité ou le titre juridique nécessaire pour pouvoir figurer dans une procédure et la capacité d’agir en Justice et ce, conformément à l’article 9 du Décret D/98/N° 100/PRG/SGG du 16 juin 1998 portant Code de procédure civile, économique et administrative.

Ensuite, l’article 2 alinéa 3 de la Loi organique L/2017/039/AN du 24 février 2017 portant Code électoral consacre que : « Les Cours et tribunaux veillent à la régularité des élections, règlent le contentieux électoral et prescrivent toutes mesures qu’ils jugent utiles au bon déroulement des élections ». Pourvu que le juge tranche en rendant justice sous l’empire des lois en vigueur en application de l’article 107 de la Constitution qui dispose que : « Le pouvoir judiciaire est indépendant du pouvoir exécutif et du pouvoir législatif. La justice est rendue exclusivement par les Cours et Tribunaux ».
A l’Exécutif aussi d’exécuter les décisions de Justice vu le caractère erga omnes de la loi.

Il est impérieux que tout le monde respecte la législation en vigueur. La violation de la loi résulte d’une des trois (3) situations suivantes : le refus de l’appliquer, l’excès dans son application et l’inobservation de la procédure y afférente.

Encore une fois, on ne se rend compte de l’impact de la violation de la loi que lorsqu’elle nous touche. Vivement, pour la culture du respect de la loi dans le pays.

Enfin, le respect des lois est une source de développement, une garantie de sécurité pour tous, un facteur d’encouragement des Partenaires Techniques et Financiers à soutenir davantage les projets de développement, à travers un partenariat mutuellement bénéfique.

Fait à Conakry, le 10 janvier 2020.

Mohamed CAMARA Juriste.
Doctorant en Droit à l’Université de Strasbourg.
Chargé de Cours de droit et de Sciences Politiques (UGLC, Mahatma Gandhi, Koffi Annan et UNC)
.




Guinée : les droits de l’homme à la croisée des chemins

Par Carine Kaneza Nantulya – * directrice du plaidoyer au sein de la division Afrique de Human Rights Watch.


TÉMOIGNAGE. Depuis le mois d’octobre, le pays est le théâtre de manifestations violemment réprimées. Qu’en est-il sur le terrain ? Éléments de réponse.

« En tuant mon fils, ils m’ont aussi tuée. J’aurais préféré qu’ils le laissent vivre, et me tuent, moi… Dieu nous appelle à pardonner, mais je ne peux pas pardonner à ces gens-là. » Les yeux secs, un bébé sur les genoux, menue et tout en noir, Adama Awa Diallo parle lentement. Elle raconte les derniers moments de son fils, Alpha Souleymane Diallo, qui, selon un témoin oculaire, a été tué par balle le 14 novembre 2019 par un membre des forces de sécurité guinéennes.

La répression des manifestations

Diallo s’ajoute à la vingtaine de Guinéens récemment tués lors des manifestations contre un référendum constitutionnel, une réforme fortement contestée par une opposition qui craint qu’elle ne soit un moyen pour le président Alpha Condé de briguer un troisième mandat. Diallo et ses amis chantaient des slogans contre une nouvelle Constitution quand, à la vue d’un pick-up noir appartenant à la police, ils se sont enfuis et engouffrés dans une cour. Un policier en uniforme les aurait suivis et aurait tiré, laissant Alpha mortellement blessé. Le lendemain, le gouvernement a affirmé que Diallo avait été « touché au niveau de la poitrine au quartier Concasseur par un projectile ».

Depuis le 14 octobre, des manifestations contre une nouvelle Constitution sont organisées à travers tout le pays. Les forces de sécurité les ont violemment réprimées et ont emprisonné des activistes. Des manifestants s’en sont pour leur part pris aux forces de sécurité avec des pierres et d’autres projectiles, tuant un gendarme et en blessant des dizaines d’autres. « C’est un référendum de la mort », me raconte un activiste, « tous ces morts ne feront que s’accumuler et si le gouvernement ne fait rien, notre pays risque de tout perdre ».

La révision constitutionnelle rejetée

Le président Condé apparaît pourtant prêt à entériner une nouvelle Constitution à tout prix. Après avoir pendant plusieurs mois refusé de se prononcer sur le sujet, il a, le 19 décembre, annoncé son soutien au projet et a même publié la proposition du nouveau texte fondamental.

Les partenaires régionaux, notamment la Commission des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) et la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) ont tiré la sonnette d’alarme sur la crise, appelant au respect des droits fondamentaux des manifestants et à une meilleure gestion des manifestations par les forces de l’ordre.

Depuis, les forces de sécurité font preuve de plus de retenue pendant les manifestations. Les autorités locales ont autorisé plusieurs grandes manifestations à Conakry du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), la coalition à l’origine du mouvement de protestation contre une nouvelle Constitution. La cour d’appel de Conakry a aussi relâché temporairement six leaders du FNDC le 28 novembre.

Entre la position de Condé maintenant clairement établie et une opposition inflexible dans sa volonté de la contester, la crise guinéenne prend une tournure dangereuse. Mais une évidence s’impose : les droits humains doivent figurer au cœur de toute solution politique à la crise, quelle qu’elle soit.

Faire avancer les droits de l’homme

Le gouvernement devrait reconnaître et assurer sans équivoque le respect du droit fondamental à la liberté de réunion et d’expression de tout Guinéen. Il devrait sanctionner les membres des forces de sécurité et autres responsables d’abus. Pour cela, les autorités guinéennes devraient mettre en place une cellule judiciaire spéciale, dont la mission serait de surveiller, signaler et enquêter spécifiquement sur les violations des droits humains commises dans le cadre de processus référendaires et électoraux.

Le Bureau des droits de l’homme des Nations unies, présent en Guinée, le représentant spécial du secrétaire général pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, la Cedeao et la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples devraient pour leur part placer la protection des droits humains au centre d’un agenda régional commun pour la résolution de la crise. Le gouvernement devrait quant à lui faire appel à l’assistance de ses partenaires régionaux et internationaux pour des enquêtes nécessitant des analyses criminalistiques particulières.

En l’absence de la mise en œuvre d’un processus judiciaire crédible par le gouvernement guinéen et compte tenu des tensions politico-ethniques qui sous-tendent la crise actuelle, la Cedeao devrait collaborer avec la CADHP pour mettre en place une mission d’établissement des faits sur les violations commises lors des manifestations. Cette mission serait suivie d’une commission d’enquête à même de garantir l’indépendance et la transparence des investigations.

Depuis plus d’une décennie, l’histoire électorale de la Guinée est jalonnée d’épisodes violents qui ont coûté la vie à plusieurs centaines de personnes comme Alpha. Grâce à une réputation solidement acquise lors de sa gestion de situations similaires dans la région, la Cedeao est un acteur clé pour agir et prévenir une escalade supplémentaire de la violence et l’aggravation d’une crise qui n’a que trop duré.


Cet article est republié à partir de lepoint.fr. Lire l’original ici





SCAN: «La résistance à l’oppression est un droit constitutionnel, la résistance à la dictature est un droit constitutionnel [ ]» Cellou Dalein Diallo


SCAN POLITIQUE [archiver des paroles et des écrits]


Abdourahmane Sano, coordinateur national du Front national pour la défense de
la constitution (FNDC) (à l’occasion de la marche dite de l’ultimatum du 6
janvier 2020)

« Alpha Condé n’est pas seul. Il est avec le président de la
cour constitutionnelle qui s’est rendu complice de sa démarche. Il doit
démissionner. Kory Kondiano, dont le mandat est terminé depuis le 14 janvier
2019, doit démissionner. Ces trois personnalités doivent désormais être dans la
ligne de mire de notre combat pour les libérer des bandits qui les prennent en
otage pour continuer à piller notre économie. »

La source ici


Cellou Dalein Diallo, président de l’UFDG (à l’occasion de la marche dite de l’ultimatum du 6 janvier 2020)

« La résistance à l’oppression est un droit
constitutionnel, la résistance à la dictature est un droit constitutionnel, il
faut qu’on se mobilise à partir du 13 janvier pour demander le départ d’un
président qui a perdu toute la légitimité parce qu’il a violé la constitution. »

La source ici


Faya Millimouno, président du Bloc Libéral (à l’occasion de la marche dite de l’ultimatum du 6 janvier 2020)

« Nous sommes confiants quant à la possibilité du
peuple de Guinée de se faire entendre. Il n’y aura plus jamais de 3e
mandat dans ce pays. Ça, c’est terminé »

La source ici

« Il n’y aura pas de référendum dans ce pays pour une
nouvelle Constitution. Nous avons également dit qu’il n’y aura pas une élection
bâclée dans ce pays qui pourrait conduire à la violence. C’est pour cette
raison qu’aucun parti majeur de l’opposition n’a déposé de dossier pour ces
élections programmées et nous ne reculerons pas. »

La source ici


Sidya Touré, président de l’UFR (à l’occasion de l’assemblée générale hebdomadaire de son parti le 4 janvier 2020)

« Les Guinéens ont trop souffert. Je l’ai dit dans mon
adresse à la nation. 2019 a été une année de perdu pour les Guinéens. [  ] En 2009, quand l’armée avait voulu
confisquer le pouvoir, nous nous sommes tous levés pour faire en sorte que le
pouvoir soit rendu au peuple. Nous poursuivons le même combat. Le pouvoir doit
revenir au peuple conformément à la constitution. »

La source ici

« Nous sommes en 2020, c’est la refondation de l’Etat.
Nous sommes dans un état néant, il n’y a rien, c’est une seule personne qui
fait tout. [  ] Nous sommes tombés trop
bas, notre pays est complément foutu »

La source ici


Sékou koundouno, responsable à la planification du FNDC (à l’occasion de la marche dite de l’ultimatum du 6 janvier 2020)

« On ne peut
pas laisser un groupe de gangsters faire de cette Guinée ce qu’ils veulent dans
l’illégalité totale. Le référendum se passera sur nos cadavres, car il n’y en
aura pas et nous empêcherons la tenue de n’importe quelle élection truquée »

La source ici





[Rétro 2019] Afrique : la démocratie à l’épreuve des réformes [Éthiopie, Bénin, Guinée]


Abonnée aux crises politiques, l’Afrique n’a pas dérogé à la règle en 2019. Et une fois de plus, c’est le jeu démocratique qui a fait les frais de réformes initiées par des dirigeants. Quelques exemples.

Éthiopie : des réformes mal comprises ?

Abiy Ahmed sera-t-il élu aux législatives de cette année, mieux
sera-t-il reconduit à son poste de Premier ministre en Éthiopie ? Oui a
priori, vu l‘œuvre que le leader de 43 ans réalise dans son pays depuis
son arrivée au pouvoir en avril 2018.

La normalisation des relations avec l‘Érythrée après plus de deux
décennies de conflit, la médiation dans de nombreux différends
inter-États et bien d’autres initiatives ont fait d’Ahmed un grand
artisan de la paix dans la corne de l’Afrique.

Dans une Éthiopie fragilisée par des divisions ethniques, la
privation des libertés et bien d’autres pratiques frisant
l’autoritarisme, Abiy Ahmed marque les esprits. Libération des
prisonniers politiques, loi sur la parité absolue, nomination d’une
opposante à la tête de la commission électorale… Pour le Premier
ministre, il fallait recourir à ces grands remèdes pour guérir les maux
qui jusqu’ici mettaient à mal la paix dans le pays.

Seulement voilà. En concevant toutes ces réformes qui lui ont
pourtant valu le prix Nobel de la Paix en octobre 2019, Abiy Ahmed n’a
pas imaginé qu’un de ses anciens compagnons et frères de la région
d’Oromia se mettrait en embuscade pour lui mettre les crocs en jambe.

« Je ne suis pas d’accord avec la voie qu’il suit », déclarait le 31
décembre dernier, Jawar Mohammed, fondateur du média d’opposition
Oromia Media Network (OMN), alors qu’il
rejoignait l’opposition tout en qualifiant Ahmed de dictateur et en
promettant de le défier aux législatives qui auront lieu cette année.

Avant cette défiance dans les urnes, ces réformes ont déjà été à la
base de la défiance dans la violence. Ainsi qu’en témoigne la mort en
octobre dernier de près de 67 personnes lors des violences nées des
manifestations de partisans de Jawar Mohammed.

Il faudra donc désormais composer avec cette nouvelle donne imposée par le chef de l’OMN pour qu’Abiy Ahmed mène à bien ses réformes. Une tâche aussi difficile qu’une épreuve de funambule.

Bénin : de l’exemplarité à l’autoritarisme ?

Si l’année 2019 marque le 30e anniversaire de la chute du mur de
Berlin, suscitant le discours de la Baule de Mitterrand, élément
déclencheur du processus de démocratisation en Afrique, c’est bien le
pionnier africain de la démocratie des années 1990 qui a focalisé toutes
les attentions au cours de l’année écoulée.

Au commencement, la réforme du code électoral. Adoptée en août 2018
par l’Assemblée nationale et promulguée un mois plus tard, la loi
2018-31 portant code électoral avait modifié les conditions
d‘éligibilité à différentes élections. Et là où le bât a le plus blessé,
c’est au niveau de la caution.

Il faudra par exemple débourser 250 millions de francs CFA (environ 380 000 euros) pour la présidentielle, contre 15 millions auparavant, et 249 millions de francs CFA par liste présentée pour les législatives (contre 8,3 millions auparavant).

Mais auparavant, il y a eu une nouvelle charte des partis politiques
destinée principalement à redéfinir ou réduire le paysage politique en
deux blocs politiques : la majorité et l’opposition.

Des mesures saluées par le camp présidentiel, mais boudées par
l’opposition et des observateurs qui redoutent l’exclusion de certaines
formations ou acteurs politiques.

Et c’est ce qui s’est produit lors des législatives d’avril 2019,
car aucun parti d’opposition ne s‘était conformé aux nouveaux critères.
Conséquence : une grave crise politique qui a fait quelques décès et le
départ en exil de l’ancien président Boni Yayi. Ce dernier a fini par
rentrer en fin décembre.

Jamais le Bénin qui incarnait l’exemplarité même en matière de la
pratique de la démocratie depuis les années 1990 n’avait un offert une
telle image au monde.

Guinée : le « Mandela de l’Afrique de l’Ouest » sur le chemin de la dictature ?

« Je vous garantis que seule la volonté du peuple sera la décision
finale qui s’imposera à nous tous ». Ainsi parlait le président guinéen
Alpha Condé le 31 décembre dernier dans son message de vœux de nouvel an
à son peuple.

Et comme dans toute société démocratique, les urnes restent la
meilleure manière de faire triompher la volonté du peuple. Les Guinéens
devraient ainsi avoir rendez-vous avec les urnes pour approuver ou
rejeter la modification de leur Constitution votée en 2010.

La mouture du nouveau texte fondamental disponible depuis décembre
dernier après avis favorable des présidents de la cour constitutionnelle
et de l’Assemblée nationale entend apporter des modifications majeures.

L‘éventuelle future nouvelle constitution guinéenne stipule par
exemple que le mandat présidentiel devrait passer de cinq à six ans
renouvelable une seule fois, comme on peut lire en son article 40.

Il y a aussi que le Premier ministre devrait cesser de n‘être
responsable que devant le président de la République. Le président de la
Cour constitutionnelle ne devrait plus être élu par les membres de
l’institution pour être directement nommé par le chef de l‘État.

Sur le plan social, la mouture prévoit des mesures comme la gratuité
de l‘éducation pour les enfants jusqu‘à 16 ans. Sans oublier
l’assistance aux personnes âgées.

Pour Alpha Condé qui aime dire avoir hérité d’un pays plutôt que
d’un État, ces réformes sont destinées à « moderniser » les
institutions.

Argumentaire insuffisant pour persuader l’opposition et des
organisations de la société civile dont la campagne « Tournons la page »
qui y voient un stratagème pour M. Condé de briguer un troisième mandat
consécutif. Mieux, « un coup d‘État ».

« Modifier une Constitution ou adopter une nouvelle Constitution
pour se maintenir au pouvoir et empêcher l’alternance démocratique est
une forfaiture, une haute trahison sévèrement condamnée par la
Constitution du 7 mai 2010 et par les organisations africaines »,
expliquait en décembre dernier, Fodé Oussou Fofana, vice-président de
l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), principal parti d’opposition.

Mais le « Mandela de l’Afrique de l’Ouest » (il s‘était surnommé
ainsi à sa sortie de prison en 2001) s’abstient jusqu’ici de dévoiler
ses intentions quant à la présidentielle de 2020.

Reste à savoir si l’actuel locataire du Palais Sékhoutouréya n’y sera pas obligé par son peuple.

Le débat sur la constitution a déjà fait des victimes humaines. En novembre 2019, plus de trois personnes ont trouvé la mort lors des manifestations de l’opposition contre la réforme constitutionnelle.


Cet article est republié à partir de fr.africanews.com. Lire l’original ici





Les vœux du nouvel an de la classe politique : les extraits de Guinée Politique


Cellou Dalein Diallo, Lansana Kouyaté, Sidya Touré, Bah Oury, Alpha Condé, Aliou Bah, quelques acteurs politiques guinéens se sont prêtés à l’exercice des traditionnels vœux de nouvel an. La rédaction de Guinée Politique vous propose quelques extraits.


Cellou Dalein Diallo, président de l’UFDG (parti d’opposition) dresse un bilan sombre du régime d’Alpha Condé

L’intégralité ici

Lansana Kouyaté, président de PEDN (parti d’opposition) pour un message d’espoir présente quelques axes de son programme

L’intégralité ici

Alpha Condé (président de la République) parle des législatives de février 2020 et le projet de nouvelle constitution

L’intégralité ici

Aliou Bah, président du MODEL (parti d’opposition) parle de la nécessité d’une refonte de l’espace politique et d’une alternance en 2020

L’intégralité ici

Bah Oury, président de l’UDD (parti d’opposition) dénonce la mauvaise gouvernance et formule des vœux d’espoir

Le lien ici

Sidya Touré, président de l’UFR (parti d’opposition) parle de tourner la page

Le lien ici




Faya Millimouno chez Alpha Condé, le Bloc Libéral (BL) tente de préciser les circonstances


Dans un communiqué publié par le site mosaiqueguinee.com, le Bloc Libéral (BL) parti de Faya Millimouno donne des précisions sur la rencontre entre Alpha Condé et son leader au palais sekoutoureya ce jeudi 26 décembre 2019 et qui a alimenté les rumeurs sur les réseaux sociaux dans un contexte politique tendue après la décision de l’opposition de boycotter et d’empêcher les législatives prévues le 16 février 2020.


Depuis quelques heures nous assistons des déclarations sur la toile suite à la rencontre du Président du Bloc Libéral Dr Faya Millimouno et d’Alpha Condé ce jeudi 26 décembre 2019.

Au-delà d’être leader politique, Dr Faya Millimouno appartient à une famille tout comme tout autre guinéen.

Les sages de la forêt avaient un rendez-vous avec le Président de la République Alpha Condé dans un cadre purement social, ça n’avait rien de politique, c’est ainsi que les sages ont demandé à Dr Faya (étant leur fils) de prendre part à la délégation et de les accompagner.

Alors le Bloc Libéral vous dit tout d’abord de
rester serein, le BL reste toujours constant dans ses prises de position et le
BL défendra toujours sa conviction. Vous ne serez jamais déçu du BL.

Nous vous demandons de faire preuve de retenu et surtout prendre de la hauteur pour éviter la division de l’opposition à un moment très important de l’histoire de notre pays. Nous sommes à un tournant très décisif de notre histoire, alors cette division de l’opposition ne profitera qu’à un clan qui veut se maintenir au pouvoir.

Rien de politique n’avait été évoqué.

Le BL reste et demeure membre de l’opposition
plurielle et membre du FNDC.

Le BL ne prendra jamais une décision unilatérale.

Vous pouvez encore avoir confiance au BL et son
Président.

Vive le peuple conscient de Guinée !

Vive l’unité de l’opposition!

Vive le BLOC LIBÉRAL!





La Guinée va manifester contre son président qui veut rester au pouvoir


Le pays d’Afrique de l’Ouest s’apprête à vivre une journée à haut risque jeudi avec des manifestations massives contre le chef de l’Etat Alpha Condé.

C’est un pays dont on parle rarement : la Guinée, et ses 13 millions d’habitants (dont la moitié a moins de 20 ans). Un pays situé entre le Sénégal, au nord, et la Côte d’Ivoire, au sud. Des manifestations massives s’y préparent, jeudi 26 décembre, dans cette ancienne colonie française, en particulier dans la capitale Conakry. Vingt partis de l’opposition appellent à défiler contre le président Alpha Condé. Ils s’élèvent contre les manœuvres du président pour rester au pouvoir.

À 81 ans, Alpha Condé achève son deuxième mandat, ses dix années à la présidence, et il semble bien décidé à ne pas lâcher les rênes. Jusqu’à présent, c’était seulement une rumeur. Mais le 19 décembre, Alpha Condé est effectivement sorti du bois. Il veut faire adopter par référendum une nouvelle Constitution, qui instituerait un mandat présidentiel de six ans renouvelable (et non plus cinq ans renouvelable). Sous-entendu : les compteurs seraient remis à zéro, et il pourrait alors rester 12 ans de plus ! C’est un classique en Afrique : au cours des 20 dernières années, pas moins de 11 leaders ont ainsi fait modifier la Constitution de leur pays pour se maintenir au pouvoir. L’opposition guinéenne est évidemment vent debout et dénonce “une mascarade”.  

Dix ans au pouvoir, 12 ans de plus ?

Même
si les marches se veulent pacifiques, le risque est élevé de voir la
journée dégénérer, vu les habitudes répressives du pouvoir. Les
premières manifestations ont débuté il y a deux mois, depuis que la
rumeur court de cette révision constitutionnelle. Les affrontements ont déjà fait 20 morts,
et plusieurs leaders de l’opposition ont déjà été brièvement
interpellés. Alpha Condé voit dans ces protestations une “atteinte à
l’ordre public”.

La Guinée est familière, dans son histoire, des répressions violentes. Il y a 10 ans, 157 personnes, opposantes à la junte militaire de l’époque, avaient été tuées lors d’un véritable massacre. À l’origine, Alpha Condé est pourtant un adversaire historique de la dictature militaire. Il a été le premier à instituer un régime véritablement civil en Guinée. Mais comme beaucoup d’autres sur le continent, il s’accroche désormais au pouvoir et refuse l’idée même d’une alternance.

Les visées du parrain russe sur la bauxite

Jusqu’à
présent, la communauté internationale ne dit pas grand-chose ! Pour
l’instant c’est silence radio. Mais les grandes ONG et les principales
institutions internationales (notamment l’ONU) ne cachent plus leur
inquiétude.

Alpha Condé possède un parrain : la Russie de Poutine, qui ne cesse de s’implanter davantage en Afrique noire. L’ambassadeur russe a déjà manifesté son soutien à la réforme constitutionnelle, et on prête aux compagnies russes l’intention de tirer profit de la situation, en obtenant de nouvelles concessions d’exploitation dans le pays. Si les Guinéens sont pauvres, en revanche le sous-sol de la Guinée est riche : de l’or, des diamants, et surtout les premières réserves au monde de bauxite, d’où est extrait l’aluminium.


Cet article est republié à partir de francetvinfo.fr. Lire l’original ici


Mis à jour de l’information

Le front national pour la défense de la constitution (FNDC) a reporté sa marche prévue ce jeudi, 26 novembre. Elle se tiendra finalement le lundi, 6 janvier 2020.

Lisez le communiqué





Ne laissons pas Alpha Condé brûler la Guinée [Par Tierno Monénembo]


Avec la divulgation de la Constitution-bidon que ses sordides officines viennent de lui concocter, Alpha Condé nous prouve que rien ne le fera reculer: ni la force du peuple, ni le regard réprobateur de la communauté internationale.

Il lui aurait fallu pour cela un minimum de pudeur, qualité qu’il n’a assurément pas. Il tient à son troisième (voire son quatrième ou cinquième) mandat.  Et il l’aura, quitte à cracher sur la morale et le droit et à brûler le pays. Quand, à la faveur du hasard, des crève- la- faim comme lui parviennent au pouvoir, ils ne le quittent plus. Ils oublient tout : leur passé, leurs amis, leurs idéaux et leurs serments. Plus rien ne compte, que la folie du pouvoir et le goût effréné pour le diamant et l’or, les palaces de luxe et les gros bolides.  Quitte à tout perdre : leur vie, leur âme, leur honneur et leur patrie !

N’est-ce pas Bokassa, n’est-ce pas Mobutu, n’est-ce pas Compaoré, n’est-ce
pas Dos Santos ?

Il reste que le Rubicon est franchi, qu’il n’y a plus de point-de non-
retour. Plus besoin de questions ou de tergiversations. Les choses sont claires
dorénavant : le problème n’est plus Alpha Condé. Le problème, c’est nous !
Nous, Guinéens ! Allons-nous laisser ce fou brûler ce pays comme par notre
fatalisme et notre lâcheté collective, nous avons laissé faire tour à tour,
Sékou Touré et Lansana Conté, Dadis Camara et Sékouba Konaté ?

A qui appartient la Guinée ? A Alpha Condé, à son père, à sa mère, aux miliciens du RPG ? Non, la Guinée appartient au peuple de Guinée, je veux dire à tous ses citoyens sans aucune exception. Et quand elle est en danger, qui doit la défendre ? Le peuple, tout le peuple, c’est-à-dire tous les citoyens. Je ne vais pas vous faire un dessin, mes chers compatriotes, je ne vais passer par quatre chemins, je ne vais même pas m’encombrer de précautions littéraires : LE PAYS EST EN DANGER DE MORT !

Une mort voulue, que dis-je, une mort passionnément désirée, une mort
minutieusement programmée par Alpha Condé et par ses sataniques collaborateurs.
Cet homme sait exactement ce qu’il fait et il le fait exprès.  C’est pour
cela que nous devons l’arrêter tout suite avant qu’il ne soit trop tard. 
Cet homme se fout de notre gueule. Il ne fait que ça depuis que la mafia
françafricaine l’a hissé au sommet de notre Etat en dépit de tous les principes
démocratiques et moraux.

Il a refusé de déclarer ses biens durant tout son premier mandat alors la Constitution l’y oblige. Il continue de présider les réunions du RPG alors que la Constitution le lui interdit formellement. Il a refusé de mettre en place la Haute Cour de Justice alors que la Constitution l’y oblige. Ce qui fait que dans l’état actuel des choses, aucun membre du gouvernement ne peut être traduit en justice. Tant de laxisme de notre part ne pouvait nous conduire que là où nous sommes aujourd’hui : dans le vide juridique et dans la pagaille institutionnelle.

Ressaisissons-nous Guinéens ! Attention, le monde entier nous regarde ! Nous avons tout notre honneur à sauver. Notre comportement depuis 1958 manque cruellement de courage et de dignité. Le glorieux peuple du 28 Septembre a dégénéré en une populace de mollassons taillable et corvéable à merci. N’importe quel crétin venu au pouvoir se croit tout permis parce que nous avons appris à tout subir sans gémir, sans pleurer, sans prier. Non pas avec le splendide stoïcisme du loup de Vrigny mais avec la consternante passivité des éponges et des limaces.

Encore une fois, réveillons-nous, Guinéens ! Faisons au moins aussi bien que nos frères du Burkina Faso quand ils ont fait fuir le sinistre Compaoré en 2014 ! Refusons cette imposture, disons non à Alpha Condé, quitte à tomber sous les balles de ses sbires !

C’est le moment ou jamais de prouver que nous sommes toujours les fiers
descendants des grands guerriers qui ont fondé ce pays.

Tierno Monénembo, in Le Lynx


Cet article est republié à partir de visionguinee.info. Lire l’original ici





L’opposition guinéenne boycottera les législatives et empêchera leur tenue


Lors d’une plénière tenue ce lundi 23 décembre 2019, les leaders de l’opposition ont décidé de ne pas participer aux législatives de février 2020. Ils déclarent aussi qu’ils empêcheront la tenue de ces législatives. Dans sa déclaration, le chef de file de l’opposition Cellou Dalein Diallo, dénonce la mascarade électorale en cours de préparation : « Nous avons évalué la préparation des élections législatives. Nous avons pris acte de l’annonce de monsieur Alpha Condé de changer notre constitution. Nous avons examiné l’état de préparation des élections législatives et l’opposition s’est rendu compte qu’on est en train plutôt de préparer une mascarade électorale. D’abord au niveau de la révision du fichier nous avons tous suivi qu’il y a eu un enrôlement massif des mineurs et il y a eu des obstructions sévères contre l’enrôlement des citoyens guinéens qui avaient le droit de se faire enrôler. Il est évident que ce fichier ne reflètera pas l’état du corps électoral guinéen, des gens qui n’en n’ont pas le droit ont été massivement enrôlés et des gens qui ont le droit n’ont pas été autorisés de s’enrôler. Donc nous rejetons ce fichier et nous avons décidé que nous ne pouvons pas participer et nous ne pouvons pas accepter qu’une élection basée sur ce fichier soit organisée parce qu’elle ne reflètera pas la volonté de notre peuple qui au regard de nos lois a le droit de choisir ses députés. »

« Empêcher que ces
élections aient lieu »

Pour l’opposition, il ne s’agit pas de boycotter ces élections mais d’empêcher leur tenue. Elle pose des conditions concernant le fichier électoral et le projet de nouvelle constitution. Pour le fichier électoral, Cellou Dalein Daillo déclare : « Il faut qu’il y ait un fichier qui reflète fidèlement l’état du corps électoral et que les guinéens qui ont le droit de choisir leurs députés soient inscrits et que ceux qui n’ont pas le droit soient extirpés du fichier ». L’opposition exige aussi l’achèvement des élections locales et récuse l’actuel président de la CENI pour son manque de neutralité et d’impartialité.

Concernant le projet de nouvelle constitution, l’opposition reste ferme : « nous n’acceptons pas le changement constitutionnel, nous exigeons de participer aux élections et que monsieur Alpha Condé renonce au changement constitutionnel » poursuit le chef de file de l’opposition.

L’opposition ne manquera pas de rappeler que le FNDC continuera et intensifiera la lutte contre le changement constitutionnel en Guinée. Pour Cellou Dalein : « cette mascarade électorale en préparation a un lien étroit avec ce changement de constitution parce que monsieur Alpha Condé veut faire la mascarade pour obtenir les deux tiers ou coupler les deux scrutins : le référendum et les élections législatives. Nous ne l’acceptons pas. »





Putsch constitutionnel: le peuple n’a pas dit son dernier mot! [Par Hadiatoullaye DIALLO]


Plus
personne ne doute désormais de l’intention du Président de la République de
Guinée de rester à vie au pouvoir. Chaque citoyenne et chaque citoyen de notre
pays, y compris, les partisans du régime en place, savent aujourd’hui que le
projet de Nouvelle Constitution est une supercherie, qu’il n’a pas pour objet
de contribuer à une quelconque amélioration du système de gouvernance mais
plutôt le maintien illégal au pouvoir du Président et de l’élite corrompue et
servile qui l’entoure et ce, quel que soit le prix humain à payer par des
populations déjà meurtries par l’analphabétisme, le chômage endémique, la
pauvreté généralisée et les problèmes de santé.

Mais, alors, me direz-vous, pourquoi
chacune et chacun de nous croient inconsciemment ou non que le référendum
scélérat aura lieu et que le Président actuel arrivera à ses fins?

Parce
que, au fond, tout le monde est épuisé, épuisé par la rhétorique politique
permanente et les mensonges quotidiens qui nous sont servis depuis bientôt dix
ans; épuisé par l’absence de pause depuis plus de
soixante et un ans dans le matraquage psychologique et les répressions
mortelles de toute velléité de contestation du Pouvoir; épuisé par le sentiment
que le combat entre les politiciens ne repose que sur le besoin d’accéder au
pouvoir pour partager le gâteau des deniers publics sur le dos de l’écrasante
majorité des citoyens ; épuisé par l’absence d’incarnation du véritable
patriotisme par un parti politique ou par une personne providentielle; épuisé
par la confiscation des droits; épuisé par la corruption structurelle; épuisé
par ce sentiment diffus qu’il n’y a pas d’espoir
et qu’il faut s’en remettre à «Dieu»; épuisé par les politiques du fait
accompli et du court terme pour parer au plus pressé, illustration d’un manque
criard de Vision; épuisé par l’acharnement du Pouvoir en place à diviser les
Guinéens pour régner et pour mieux se servir ; épuisé par le manque de
perspective pour les jeunes; épuisé par la saleté; épuisé par les mauvaises
conditions de transport; épuisé par les coupures ou l’absence d’électricité;
épuisé par le manque d’eau; épuisé par le manque de travail; épuisé par la
perte des valeurs et principes; épuisé par…l’épuisement!

Faut-il pour autant renoncer à lutter
contre cette injustice flagrante et l’insulte faite au Peuple de Guinée ?

La
réponse est sans ambiguïté, Non! Pourquoi ? Parce qu’en renonçant, nous
validerons définitivement le fait que nous sommes devenus un peuple qui ne retient
pas les leçons de notre propre histoire ; Parce qu’en renonçant, nous
validerons définitivement le fait que notre pays a vocation à n’être dirigé que
par des élites corrompues qui n’ont besoin de rendre compte à personne ;
Parce qu’en renonçant, nous validerons définitivement le fait qu’un groupuscule d’élites corrompues et
leurs familles ont le droit de disposer d’à peu près tous les droits et tous
les biens de plus de douze millions d’âmes ; Parce qu’en renonçant, nous
validerons définitivement l’ancrage de notre pays dans le sous-développement
moral, culturel, économique, social, environnemental et politique.

Enfin, Que faire?

  1. Opposer
    un refus individuel et collectif au niveau de chaque personne et de chaque
    groupe constitué
  2. Résister par tous les moyens, y compris la
    désobéissance civile, à toute tentative d’imposition d’une nouvelle
    constitution,
  3. Refuser de participer à toute élection tant
    que:
  • Le fichier électoral n’est pas assaini, avec la certification d’un organisme neutre formellement agréé conjointement par les différents acteurs du processus électoral,
  • Le recensement du corps électoral ne s’effectue pas dans un délai jugé raisonnable par toutes les parties prenantes, et sous un contrôle conjoint de tous les acteurs du processus,
  • Le processus des élections locales et communautaires n’est pas entièrement clos conformément à la loi,
  • Le Président persiste dans sa volonté d’officialiser le parjure qui est à la base de cette Nouvelle constitution dont le caractère autocratique et dictatorial n’échappe à personne.

Pour
conclure, tout Citoyen Guinéen qui a peur doit se rappeler ces paroles de
Sénèque dans les Lettres à Lucilius, au milieu du premier siècle après
Jésus-Christ : «Il n’est pas de vent
favorable pour celui qui ne sait où il va”! Le Peuple de Guinée
doit montrer à ces «Dirigeants» qui confisquent leurs droits, qu’il est enfin
mûr et qu’il sait où il veut, où il doit aller.


#Amoulanfé


Par Hadiatoullaye DIALLO Étudiante en Communication à Paris




Appel au FNDC pour une lecture plus audacieuse des enjeux [Par L. Petty Diallo]


Les Guinéens
sont tenus en haleine depuis près d’un an par l’affaire du troisième mandat méticuleusement,
soigneusement et presqu’obsessionnellement montée par le RPG- et le
gouvernement.

Hésitante,
indécise et tatillonne aux premières rumeurs méthodiquement distillées par le
pouvoir, l’opposition guinéenne semblait avoir pris la mesure de l’enjeu : sa
survie ou sa mort politique.

Depuis trois
mois, elle mobilise militants et sympathisants mais aussi tout guinéen opposé à
la modification de la constitution actuelle ou à la mise en place d’une
nouvelle, prélude à un troisième mandat.

Le solde des
mobilisations des mois passés s’élève à 26 morts et des dizaines de
blessées : un nombre qui alourdit le bilan macabre de plus de cent morts
depuis « l’élection d’Alpha Condé » à la présidence.

Dans son
combat contre toutes perspectives de violation de la constitution de mai 2010,
l’opposition et la société civile se sont regroupées en front national de
défense de la constitution (FNDC).

L’engouement
soulevé par cette nouvelle entente n’a pas permis de bien creuser quelques
failles : l’absence des organismes syndicaux et la manière de cooptation
des différentes entités politico-associatives qui constituent le FNDC semblent
le démontrer.

Quand on
voit des jeunes désœuvrés dénoncer le front, accuser les anciens premiers
ministres ou ministres de tous les maux, on comprend aisément qu’il s’agit de
petits opportunistes infiltrés.  Cela conforte l’idée d’absence de
sélection, de contrôle tout au moins, qui aurait justifié ou empêché
l’appartenance au FNDC. Mais les failles et les insuffisances ne se limitent pas
à cet aspect des choses.

L’annonce,
le 19 décembre 2019 d’une nouvelle constitution, la marche vers un troisième
mandat pour M. Alpha Condé, soulève bien de questions sur la solidité et les
limites du FNDC.

En effet, la
réaction du front au lendemain du discours du président guinéen, n’est pas,
pour bon nombre de Guinéens à la hauteur de l’enjeu et ne semble pas répondre
leurs attentes.

La seule
initiative envisagée par l’opposition et le FNDC repose encore sur les
manifestations qui, de surcroit, ne sont pas immédiates. Non seulement, il
faudrait attendre la fin de Pacques et de la Saint Sylvestre (le 31 décembre
2019) mais aucune autre action d’envergure n’est programmée.

Entre temps, la nouvelle constitution est là : elle a pointé son nez
dans un premier temps. Aujourd’hui, elle est dans la maison de tout Guinéen.
Elle risque de diviser les familles, de s’interposer entre les époux, les amis,
les frères et les sœurs, de monter dans les lits et les plafonds. Elle rôde
déjà autour des voisinages avant de les opposer. Espérons juste à couteau tiré
et non en bruit de canon.

Pourtant,
que n’avons-nous entendu : « Si Alpha Condé osait ; le jour
où Alpha Condé dira qu’il est candidat ; le jour où… » Et il est bien
arrivé ce jour. L’éléphant n’a pas accouché d’une souris du côté du pouvoir.

La souris
semble venir du FNDC car les Guinéens s’attendaient à autre chose que :
« vu que ; compte tenu de ceci et cela, en raison de l’approche des
fêtes… ; dès début janvier ; on n’est pas d’accord ; on ne
laissera pas faire ; il n’y aura pas telle ou telle chose tant que telle
ou telle exigence n’est pas satisfaite… ».

Toute une
litanie de menaces qui n’ébranleraient pas un chef de quartier à plus forte
raison un Président de la République. Même si ce n’était la nôtre.

Le temps
n’est plus au discours. Les blablateries ne feront pas partir le président
guinéen, ni les danses, les folklores, les Mamayas en l’honneur de nos leaders.
Pas plus que l’hymne du FNDC. Il faudrait bien autres choses et le FNDC
doit : 

– Montrer clairement
quelle est sa finalité.
Son objectif est bien connu. D’après ce qu’il
dit, c’est : « s’opposer à toute nouvelle constitution ;
empêcher le troisième mandat pour M. Alpha Condé ». Mais la constitution
nouvelle (qui n’apporte de nouveau que les 6 ans à la place des 5 et la fin du
statut de chef de file).

Une finalité n’est pas un objectif : le dernier fixe un but. Le second détermine l’issue, la manière, la méthode, la stratégie d’y parvenir. Si les marches et autres manifestations ont pour objectif ce qui est énoncé plus haut, les Guinéens ont besoin de connaitre qu’elle est la finalité fixée.

-Se poser
les bonnes questions :
tout bon résultat dépendant de la
manière de se questionner, le FNDC doit savoir s’il doit continuer à appeler à
marcher pour continuer de mourir ou s’il doit changer d’optique et de stratégie
politique.

On sait bien
que les marches se sont révélées, jusqu’à présent, improductives, dépensières,
meurtrières. Qu’elles ont apportés plus de morts que de solutions.

Cela
sous-entend qu’il ne sert plus à grand-chose d’aller manifester pour marcher
vers sa tombe. En clair, le FNDC doit appliquer le principe
politique : « à situation nouvelle, orientation et stratégie
nouvelles ».

-Se remettre
en cause : 
toutes les organisations qui composent le FNDC
devraient non seulement faire leur autocritique mais aussi accepter la
critique.

Se
débarrasser de certaines habitudes en cours au sein des partis
traditionnels 
: très souvent les louangeurs occupent le haut du pavé
en Guinée. Leur langue mielleuse, leur vocabulaire laudatif avec tous les
superlatifs inimaginables, leur médiocrité est bien accueillie et prime sur les
réflexions des cadres et intellectuels. Dès lors, la médiocratie instaurée en
système, tout bord politique confondu, plombe l’avenir du pays.

-Se donner
une lecture plus audacieuse des enjeux du pays
. Le premier
enjeu pèse sur le FNDC sur lui-même en tant que porte- flambeau des Guinéens
déçus du pouvoir en place et qui cherchent une alternative. Le tout est de
savoir s’il peut satisfaire cette perspective en évitant la reproduction du
passé.

-Dépasser
les enjeux liés aux simples relations entre partis politiques traditionnels de
certaines habitudes en cours :
dans cette perspective, les
présidents des partis politiques qui concourent à l’accession au pouvoir
devraient avoir un nouvel état d’esprit en dépassant les égos personnels :
être à l’affût tout en se disant, si ce n’est pas moi, ce ne sera pas toi.

-Se révéler
réellement comme une nouvelle structure qui tranche avec les anciennes :
les forces
vives ont combattu pour un idéal bien connu à l’époque. Le combat du FNDC ne
peut s’assimiler à celui-là.

Aujourd’hui, on est face à un pouvoir bien installé qui se fait prévaloir d’être démocratique alors qu’il est viscéralement dictatorial et ethnocentrique. Les armes ne peuvent pas être les mêmes. Tout comme les méthodes. Il faut plus de détermination, d’audace. Surtout de clarté dans la ligne suivie.

-Les
discours et les manifestations récurrentes doivent céder le pas à l’action
immédiate.
Les Guinéens ont entendu toutes sortes de menaces
comme soulignées plus haut. Ils se disent où sont-elles passées ? Des
jours se sont écoulés.

M. Alpha
Condé a lancé le pavé dans la mare. Il s’en est allé papoter tranquillement
avec ses pairs. D’aucuns aussi avides de troisième mandat qu’il ne l’est
tendaient l’oreille. Ils seront désormais plus attentifs et sûrement très
avenants au cas où le triple mandat passe. Surtout s’il était agrémenté à la
guinéenne de 2 fois 6 ans.

-Les partis
politiques membres du FNDC doivent arrêter toute participation à quelque
processus électoral que ce soit.
Il est absurde de vouloir la
fin d’un système et siéger avec lui dans les institutions nationales. Il est
tout autant contradictoire et inconséquent de réclamer des élections,
d’assister impuissant à l’arrêt du processus sans qu’il ne soit achevé et
vouloir y participer pour gagner.

Aucune
élection ne devrait (ne doit tout simplement) avoir lieu dans les conditions
actuelles. Mais ce ne sont pas les déclarations à l’emporte-pièce qui les
empêcheront. Il faut s’en donner les moyens. Tous les moyens.

Si certaines
de ces préconisations n’étaient pas prises en compte, il est fort à craindre
que la messe ne soit dite pour le FNDC, les partis politiques et associations
qui le composent.

Une telle
éventualité est d’autant plus probante que la réaction du FNDC à la déclaration
du président Alpha Condé n’est pas, au risque de me répéter, à la hauteur ni
des enjeux ni des attentes.

Le FNDC
risque fort bien de se dévoyer et de rejoindre la longue lignée des mouvements,
soit mort-nés, soit de feu de paille et sans lendemain qui ont déçu les
guinéens après les avoir tant fait rêver. Pour l’éviter, il doit se montrait plus
conséquent, plus ferme, plus réactif et de la bonne manière.

Il doit prendre la mesure afin de ne pas rater le coach en se
diluant dans des annonces et des marches sans lendemain. En se contentant de
discours et de prévenances face aux actions concrètes du pouvoir.

La FNDC
devrait savoir qu’au-delà du troisième mandat, c’est l’enjeu du pays et de
l’opposition guinéenne, dont il est partie prenante, qui se joue depuis jeudi
19 décembre 2019.

A l’opposition toute entière de faire peau neuve pour survivre et sauver le pays. C’est la seule manière de montrer aux Guinéens qu’ils n’ont pas perdu du temps en se battant à ses côtés.

Enfin, une
chose est sûre : M. Alpha Condé et son système ne perdent pas de temps et
ne s’embarrassent de rien : ni de leur survie ni du devenir du pays.

Mais le peuple de Guinée saura jouer sa partition avec ou sans les uns et les autres.


Par M. Lamarana Petty Diallo , Guinéen- Professeur Hors-Classe, lettres-histoire, Orléans- France

NB: Le titre initialement choisi par notre contributeur était Troisième mandat: La messe serait-elle dite ?





Entre colère et révolte, la twittosphère #224 dénonce la nouvelle constitution


Résumé de l’actualité guinéenne sur Twitter


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Le problème

Les réactions


Revue de tweets réalisée par Sékou Chérif Diallo





Alpha Condé et sa nouvelle Constitution : les titres de la presse internationale


L’annonce d’une nouvelle Constitution: la presse internationale en parle


Cliquez sur l’image pour lire l’article.


FRANCE 24


RFI


JEUNE AFRIQUE


REUTERS


PRESSAFRIK


TV5MONDE


BBC


BLOOMBERG


SENEGO


VATICAN NEWS


KOACI


EFE


LE NOUVEL AFRIK


ALLAFRICA


LE POINT


OEIL D’AFRIQUE


FINANCIAL AFRIK


Une revue de presse réalisée par Sékou Chérif Diallo





Nouvelle Constitution : Alpha Condé déclare la guerre à la démocratie


« C’est au peuple de choisir », vieille antienne tristement adoptée par l’opposant historique devenu président. En annonçant ce jeudi 19 décembre 2019, de façon solennelle son intention de soumettre son projet de nouvelle constitution, Alpha Condé 81 ans, intègre honteusement l’école de Sassou Nguesso du Congo, Pierre Nkurunziza du Burundi.


Par cet acte, Alpha Condé renie toutes les valeurs démocratiques pour lesquelles il avait donné l’illusion de défendre après plus de quarante années passées dans l’opposition. Après la difficile et tragique transition militaire qui a abouti à l’élection présidentielle de 2010, la Guinée n’avait pas besoin d’une énième crise politique qui fragilise davantage les institutions et met en danger la stabilité du pays.

Au sortir de la présidentielle de 2010, tous les observateurs
affichaient un certain optimisme quant à la capacité de résilience de ce
peuple à œuvrer pour rectifier la trajectoire chaotique de ce pays de
l’Afrique de l’Ouest qui avait toutes les cartes en main au lendemain
des indépendances pour amorcer son développement. Comme le souligne ce
passage repris dans un article de l’agence Reuters :
« Quel qu’il soit, le vainqueur de la présidentielle devra d’abord
apporter la paix, puis l’électricité et l’eau, bâtir des écoles et des
routes, disent des Guinéens lassés des régimes répressifs, du chaos et
de la violence. Rien de tout cela ne semble hors de portée dans un pays
qui tire chaque année plusieurs dizaines de millions de dollars de ses
ressources naturelles, notamment de la bauxite, dont il est le premier
producteur mondial. »

Rien ne justifie cette « nécessité » d’une nouvelle constitution pour
la Guinée. Un an avant la fin de son deuxième et dernier mandat
présidentiel, Alpha Condé engage le pays sur un chemin dangereux où
incertitudes, instabilité et violences bouleverseront la quiétude
sociale. Cette volonté manifeste de confiscation du pouvoir doit être
combattue par toutes les composantes sociales du pays.

Récapitulons : Le 20 avril 2019, Alpha Condé accorde un entretien à des journalistes sénégalais dans lequel il affirme : « S’il
y a modification de la Constitution, il y a troisième mandat. S’il n’y a
pas de modification de la Constitution, il y a mandat ou pas 
» ; le 29 mai 2019, le premier ministre Ibrahima Kassory Fofana affiche officiellement son soutien et celui de son gouvernement à la mise en place d’une nouvelle Constitution; le 4 septembre 2019, Alpha Condé instruit à son premier ministre d’organiser des consultations sur la constitution ; le 22 septembre 2019, en visite à New York, Alpha Condé demande à ses militants
de se préparer pour un référendum ; le 9 octobre 2019, dans une
déclaration à la télévision nationale, le premier ministre annonce la
transmission du rapport sur les consultations au président de la République ; le 14 octobre 2019, première manifestation
du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC) contre
l’ambition du président Alpha Condé de briquer un troisième mandat.
Suivront plusieurs autres manifestations qui ont enregistré plusieurs morts.

Aujourd’hui, toutes les institutions nationales sont inféodées à
l’exécutif, les autorités morales sont muettes. Malgré toutes les
alertes de citoyens, mouvements et autres personnalités africaines, les efforts du National Democratic Institute (NDI) et la Fondation Kofi Annan (KAF)
à travers la mission des anciens chefs d’état nigérian et béninois à
Conakry, l’Union Africaine et la CEDEAO observent depuis un certain
temps le pourrissement de la situation en Guinée et se contentent de
publier de communiqués pour condamner les tueries lors des manifestations qui ne sont que les conséquences des manœuvres antidémocratiques d’Alpha Condé.

Face une telle situation, seules les manifestations de rue peuvent
encore sauver la démocratie embryonnaire dans ce pays. Pourquoi les
manifestations ? Parce que c’est une forme de contestation admise,
légale et démocratique. Le FNDC doit intensifier les actions de
mobilisations pour empêcher ce putsch constitutionnel.

Après l’annonce d’Alpha Condé d’hier et les révélations des commissaires de la CENI
sur la gestion unilatérale du processus électoral par le président de
l’institution, le calendrier des législatives n’est plus à l’ordre du
jour et l’opposition politique doit enfin sortir de la diversion de ces
derniers jours où elle s’était embourbée bêtement pour se consacrer
exclusivement à la défense de l’essentiel : la constitution.

Si les promoteurs de cette forfaiture de troisième mandat se sont
inspirés des cas réussis de manipulations des constitutions observées en
Afrique ces dernières années (Sassou Nguesso du Congo en 2015 et Pierre Nkurunziza du Burundi la même année), ils oublient un détail : le traumatisme des peuples
de ces deux pays suite aux guerres civiles qu’ils ont connu est encore
présent et les appréhensions teintées de fatalisme alimentent les
angoisses et la peur de revivre ces épisodes douloureux de leur
histoire. Il faut rappeler que le 5 juin 1997, le Congo basculait dans une  guerre civile.
Un conflit entre les milices de Pascal Lissouba, alors président en
exercice, et celles de son prédécesseur Denis Sassou Nguesso. Et l’histoire du Burundi,
depuis les premières années de son indépendance en 1962, est marquée
par des violences ethniques compliquées par une lutte acharnée pour le
pouvoir.

Ces éléments historiques sont importants pour rappeler aux incultes
apprentis sorciers qui ont imaginé ce projet de troisième mandat pour
Alpha Condé, que les trajectoires politiques des pays obéissent parfois à
des histoires politiques encore plus complexes.

Le cas de la Guinée est plus proche du cas burkinabé car les deux
histoires politiques ont des éléments de similitudes (ces deux pays
n’ont pas connu de conflits ethniques). Au Burkina, Blaise Compaoré, 27
ans au pouvoir avait pensé comme Alpha Condé aujourd’hui qu’il suffisait
d’un simple coup de gomme pour effacer les passages contraignants dans
une constitution. « Il a suffi de trois jours pour que Blaise Compaoré
soit poussé dehors par le peuple. Mais trois jours minutieusement
préparés » comme le révèle une enquête menée par Jeune Afrique.

En créant de toutes pièces cette crise politique aux conséquences
désastreuses pour la Guinée et la sous-région, Alpha Condé sera tenu
responsable de toutes les dérives de son régime et il répondra devant la
justice pour tous les crimes commis en Guinée depuis son accession au pouvoir en 2010.

Par cette décision de confiscation du pouvoir à travers une nouvelle constitution dont le seul objectif est de s’octroyer un troisième mandat, Alpha Condé engage un rapport de force qui sera, certes, difficile et long avec les forces démocratiques du pays, mais il reculera quand la pression sera très forte. Lorsqu’il y a du monde et que les manifestations durent, beaucoup de dirigeants reculent face au pouvoir de la rue, c’est une réalité observée et documentée (Algérie, Soudan, Tunisie, Égypte, Burkina, Sénégal …).


Par Sékou Chérif Diallo Fondateur/Administrateur www.guineepolitique.com




Législatives: sept commissaires de la CENI dénoncent et se désolidarisent du fichier électoral en cours de conception


Dans une déclaration rendue publique ce mardi 17 décembre 2019, sept commissaires de la Commission électorale nationale indépendante de la Guinée ont annoncé leur retrait du processus électoral des législatives. 

Ils disent être « dans l’incapacité d’établir les statistiques à savoir combien d’électeurs enrôlés, combien de nouveaux et combien de mise à jour », condamnent « le blocage de l’accès aux résultats de dédoublonnage », « la confiscation des données et cette mise à l’écart des commissaires dans le traitement des données au site central », « la non mise à disposition par l’Etat, des fonds nécessaires à la conduite des opérations d’une telle envergure. Mais aussi, l’implication obscure du Président de la CENI dans les conflits sur le terrain », « l’abus de pouvoir par les autorités administratives, locales, et diplomatiques et, l’ingérence aigüe des commis de l’état dans le processus électoral », « le manque d’investigation sérieuse pour identifier les auteurs de ces actes (enrôlement des mineurs) afin de prendre des mesures disciplinaires », « la banalité avec laquelle toute une franche de guinéens est privée de son droit le plus fondamental en matière de démocratie », « ce mépris vis-à-vis des Commissaires Chef de mission et cette attitude du Président à vouloir alimenter les conflits et favoriser la violation de la hiérarchie institutionnelle » ….

Ces commissaires de la CENI vont plus loin et recommandent
entre autres : l’arrêt du déroulement du chronogramme en cours pour
évaluer objectivement ce processus d’enrôlement des électeurs ; l’acquisition
d’un module d’extirpation des mineurs pour sortir tous les mineurs du
fichier actuel ; le respect scrupuleux de l’article 19 pour le recensement
des Guinéens de l’étranger …


DÉCLARATION RELATIVE AUX IRRÉGULARITÉS DES OPÉRATIONS D’ENRÔLEMENT